Les passionnés de créations uniques ou d’articles de décorations seront éblouis devant les œuvres des artisans écaillistes de la Réunion. Dans son reportage, Anna Belissens s’est rapproché de ces maîtres créateurs et nous partage leur savoir-faire et le secret de leur métier.
Le métier d’écailliste à La Réunion
Plus qu’une simple profession, le travail de l’écaille de tortue représente un véritable patrimoine artistique à La Réunion, et ce, depuis plusieurs décennies. L’activité des artisans écaillistes de l’île de La Réunion est d’ailleurs garantie par un arrêté conformément à la convention de Washington (CITES) en date du 9 novembre 2000. Ce décret leur donne l’autorisation de se servir des stocks d’écailles inventoriés avant 1984. A l’heure actuelle, seuls quatre artisans écaillistes continuent d’exercer dans l’île. Jusqu’ici, ils se servent d’un stock qui date l’année 2000. Une fois que le stock sera épuisé, le travail d’écaille ne sera plus qu’un vague souvenir.
L’écaille de tortue, une matière noble
Unique en son genre, l’écaille de tortue représente une matière d’une grande noblesse héritée des ancêtres. Classée dans la catégorie des « semi-précieuses », elle a le privilège d’être à la fois vivante, sauvage et raffinée. Elle se prête également à de nombreuses transformations grâce à laquelle l’artisan peut réaliser divers objets entre les articles de décorations, les ustensiles de cuisine et d‘autres objets utiles au quotidien. En outre, l’écaille de tortue se décline en différents coloris avec des reflets pouvant être bleutés, rousses, noires ou transparentes. Bref, il s’agit d’une matière polyvalente qui a traversé de nombreuses générations d’artisans.
Nicol Payet, 27 ans de passion pour l’écaille de tortue
Parmi les quatre artistes continuant d’exercer le métier d’écailliste à La Réunion, Nicol Payet conjugue savoir-faire, créativité et passion. L’artisan débute en 1982 comme par hasard. Alors qu’il écoutait à la porte du directeur de son lycée, il entendait parler d’un nouveau stage à Saint-Leu. Il s’inscrit pour la formation qui dure six mois, la période précédant son adhésion au service militaire. Le stage se déroule dans l’ancienne gare de chemin de fer de Saint-Leu. La première approche de l’artisan fut magique surtout en rencontrant l’écaille de tortue, cette matière dont il tombe amoureux dès le premier regard. Pendant toute la durée de son stage, Nicol se forme au travail de l’écaille. Il apprend la technique de la découpe de la matière, il s’initie à la soudure, à la fabrication de bijou sans oublier la marqueterie.
Au fil du temps, Nicol se professionnalise dans le métier et s’initie à la maîtrise de la laque auprès du couple Picard. Après deux ans de professionnalisation, l’artisan décide de monter sa propre entreprise en 1988. Il s’intéresse particulièrement à la laque synthétique, capable de s’adapter à tous les types de support. Nicol parvient alors à créer un panneau moderne pouvant résister à l’eau et la chaleur ambiante. L’écaille de tortue associée à la laque avec une bonne dose de concentration ont permis à l’artisan d’aller au-delà de ses imaginations en créant des luminaires, des meubles, des bijoux et bien d’autres articles.
En 27 ans, l’artisan ne garde que de bons souvenirs de son métier. Il se rappelle surtout de sa première table basse en laque et en écaille de tortue. Aussitôt qu’elle fut exposée au parc des expositions de Saint-Denis, elle tombe entre les mains d’un acquéreur. Ses 27 ans de carrière ont été pour lui des instants de bonheur et il sera toujours fier de son tableau renfermant un jacaranda aux couleurs variées selon l’intensité de la lumière à laquelle il est exposé.
Pierre Bernard, fidèle à ses créations
Pierre Bernard, un des quatre rescapés dans la profession d’écailliste, est tombé sur l’écaille de tortue en 1989. Il arrive à l’île de la Réunion pour y fabriquer des bijoux. L’artisan se spécialise surtout dans le métal et il fait la connaissance de l’écaille de tortue lors de sa visite de la « Ferme Corail » à Saint-Leu. Il y découvre des échantillons de la matière et il a suffi de quelques essais pour qu’il tombe sous son charme. Pierre qualifie l’écaille de tortue comme étant la « matière précieuse la plus polyvalente au monde ».
A l’origine, on reconnait Pierre Bernard par la création de bijoux en écaille de tortue. Plus tard, l’artisan conquis par la polyvalence de la matière se lance dans diverses créations comme la coutellerie de chasse, de combat et autres sabres. A l’écaille de tortue, il ajoute le bois, en particulier les essences réunionnaises comme le bois de tamarin, le letchi, le cassia de Siam ou encore le bois de fer. A partir de ce moment, l’écailliste se penche plutôt sur l’art de la table, plus particulièrement sur les couteaux pliants. Passionné par son métier, Bernard prend plaisir à accueillir le public dans son atelier en exposant ses talents et les modèles disponibles.
L’écaille de tortue fait la renommée de l’île de La Réunion aux quatre coins du monde. Les œuvres de Nicol Payet par exemple sont vendues en France, en Italie, en Chine ainsi qu’aux Etats-Unis et en Australie.
Si vous voulez vous procurer un de ces objets uniques ou si vous êtes passionnés par son travail, vous pouvez visiter « Le Tabou » situé au 1 avenue des artisans, 97436 Saint-Leu. Vous pouvez également contacter le +262 262 34 82 59 ou visiter sa page Facebook. La boutique Saxo située à 20D Chemin Summer 97434 Saint Gilles Les Bains ouvre également ses portes à tous ceux qui veulent rencontrer d’autres artisans écaillistes à La Réunion.