Graeme Sloan/Sipa USA/SIPA
Douze femmes, réduites à l’esclavage sexuel pendant la Deuxième Guerre mondiales, ont porté plainte contre le gouvernement japonais.
Vendredi 8 janvier, le tribunal sud-coréen du district central de Séoul, a ordonné au gouvernement japonais de verser une indemnité à 12 esclaves sexuelles de la Seconde Guerre mondiale ou à leurs familles. Selon l’agence sud-coréenne Yonhap, relayée par France 24, Tokyo devrait payer 100 millions de won (74 000 euros) à chacune des victimes ou à leurs familles.
La chaîne indique qu’il s’agit du premier dossier civil présenté à la justice en Corée du Sud contre Tokyo. Les victimes, appelées dans un euphémisme "femmes de réconfort", étaient les esclaves sexuelles des militaires japonais.
Pendant le procès, le tribunal relève que le Japon impérial était responsable de ce système. Il a révélé que les plaignantes furent soumises à une exploitation sexuelle prolongée. "Cela relevait d’un acte illégal contre l’humanité et le défendeur a l’obligation de compenser les victimes pour le préjudice mental", a-t-il indiqué.
La plupart des historiens ont révélé que pendant la Deuxième Guerre, jusqu’à 200 000 femmes, notamment originaires de Corée, mais aussi venant d’autres pays asiatiques, ont été forcées à se prostituer dans des bordels militaires japonais.
Après avoir eu connaissance de cette décision, Tokyo a contesté la légalité de ces poursuites. Le gouvernement nippon a ainsi condamné ce jugement avant de convoquer l’ambassadeur de Corée du Sud.
Le ministère japonais des Affaires étrangères a indiqué, dans un communiqué qu’il est extrêmement regrettable que le tribunal du district central de Séoul nie le principe de "l’immunité souveraine" des Etats. "C’est pour le gouvernement japonais inacceptable", a-t-il martelé.,
La chaîne confie aussi que le gouvernement japonais nie sa responsabilité directe de ces violences sexuelles, car les victimes avaient été recrutées par des civils et que les bordels militaires étaient exploités commercialement.
Douze plaignantes dont cinq sont encore en vie ont intenté des poursuites contre Tokyo, il y a 8 ans. Ce dernier a toujours refusé de comparaître en estimant que ce contentieux a été réglé par le traité de 1965 impliquant le versement de réparations. En outre, il stipulait que toutes les réclamations entre les Etats et leurs ressortissants se trouvaient "réglées complètement et définitivement". Pourtant, d’après le tribunal sud-coréen, cet accord ne portait pas sur le droit des femmes à réclamer des dédommagements au Japon.
Kim Kang-won, un des avocats des plaignantes a indiqué aux journalistes qu’il s’agit du premier verdict du genre pour les victimes qui ont souffert à cause des troupes japonaises. "Je suis profondément émue par la décision rendue aujourd’hui", a-t-il annoncé.
Par ailleurs, il a rejeté l’argument selon lequel le contentieux aurait été vidé en 1965, car à cette époque, la question tragique des "femmes de réconfort" ne faisait l’objet d’aucune discussion.
Il a fallu, effectivement, attendre les années 1990 pour que ce douloureux sujet émerge véritablement en Corée du Sud à la suite des mouvements féministes.
Un accord "définitif et irréversible" a été conclu entre la Corée du Sud et le Japon en 2015. Le texte prévoit que ce dernier offrait ses "excuses sincères" et versait un milliard de yens (7 millions d’euros) de dédommagements à une fondation pour aider les rares "femmes de réconfort" sud-coréennes toujours en vie.
Pourtant, cet accord a été critiqué par une partie de l’opinion sud-coréenne en raison notamment du refus japonais d’assumer une pleine responsabilité juridique.
Depuis son arrivée au pouvoir, l’actuel président Moon Jae-in l’avait déclaré nul en regrettant que les victimes n’aient pas été associées à sa négociation.