L’ancien ambassadeur de France en Syrie reconnaît pour la première fois avoir eu un entretien avec des dirigeants du cimentier Lafarge. L’entreprise est pourtant suspectée d’avoir versé une importante somme à l’État islamique pour que ses activités ne soient pas impactées par la guerre.
Les langues au Quai d’Orsay se délient enfin dans le cadre de l’enquête sur le financement du terrorisme qui vise Lafarge. Eric Chevallier, l’ancien ambassadeur de France en Syrie, a reconnu pour la première fois avoir rencontré les dirigeants de l’entreprise lors "d’un entretien à l’été 2012". La révélation a été faite dans un courrier daté du 15 janvier 2018 et adressé aux juges en charge de l’enquête.
Cette nouvelle représente une grande avancée dans les investigations, car le Quai d’Orsay a toujours nié avoir rencontré le cimentier. Le 9 janvier 2018, il avait été confronté chez les juges à l’ancien directeur général adjoint de Lafarge, Christian Herrault, mis en examen avec cinq autres responsables du groupe.
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Lafarge est soupçonnée d’avoir versé de l’argent au groupe terroriste de l’État islamique. Les faits se seraient déroulés entre 2011 et 2015. Le cimentier aurait payé plus de 12 millions d’euros aux djihadistes et autres rebelles afin d’assurer ses activités à Jalabiya en Syrie, malgré la guerre.
Dans ses révélations aux juges, Christian Herrault a déclaré qu’Eric Chevallier était bel et bien au courant de ces négociations financières. L’ambassadeur "était au courant du racket" et disait "vous devriez rester, les troubles ne vont pas durer", avait affirmé l’ancien directeur général adjoint de Lafarge devant les magistrats. Il avait notamment assuré avoir rencontré l’ancien ambassadeur de France en Syrie à plusieurs reprises.
Eric Chevallier avait rétorqué ne "pas avoir de souvenir de ces rencontres". "Je pensais que les responsables de Lafarge qui évoquaient l’existence d’entretiens se trompaient d’autant plus que les propos qui m’étaient attribués ne correspondaient en rien à ce que j’aurais pu dire", écrit le diplomate dans un courrier. D’après le journal Libération, Eric Chevallier explique dans la lettre avoir contacté "une jeune femme du bureau", situé au Moyen-Orient. Ce serait cette femme qui lui "a indiqué que personne au ministère ne lui avait jusqu’à ce jour posé la question, mais qu’effectivement elle avait le souvenir de cette réunion". Malgré cela, le diplomate a confirmé "ne pas avoir conseillé le maintien de l’usine Lafarge en Syrie". Par rapport à cette affaire, le Quai d’Orsay n’a pas démenti.
Source : Ouest-France, Europe 1