Avoir une excellente mémoire n’est pas donné à Monsieur Tout-le-monde. Pierre B., le champion de la mémorisation fait partie de ces rares personnes dotées d’une grande capacité mémorisation. Voici ses secrets.
De nombreuses personnes recherchent tant bien que mal la bonne technique pour avoir une « mémoire d’éléphant ». Pierre B., un juriste en propriété intellectuelle, âgé de 49 ans, a participé aux championnats du monde de la mémorisation et il en est sorti champion. A l’occasion de la semaine de la mémoire qui se tient du 15 au 20 septembre, il dévoile au grand jour quelques-unes de ses techniques.
Le championnat du monde de mémoire regroupe 10 épreuves formalisées dont chacune consiste à mémoriser des séries de chiffres, de cartes ou de mots. Les épreuves se déclinent en des versions courtes, longues ainsi qu’une épreuve orale durant laquelle on restitue des chiffres au rythme d’un chiffre par seconde.
20 Minutes rapporte les discussions avec Pierre B. Pour ses records, il raconte "sur cette dernière épreuve, à l’entraînement, je suis à 35. Les meilleurs sont au-delà de 100. J’ai été le premier Français à restituer un paquet de 52 cartes dans l’ordre en moins de trois minutes. Sans aucune erreur et en les ayant vus qu’une seule fois. Aux championnats du monde, je me suis souvenu de 700 chiffres en une heure. Dans l’ordre bien sûr. Mais le record est à 2.000. Je me suis déjà aussi souvenu de six paquets de cartes en une heure. J’ai fait une erreur au 7e paquet."
Questionné sur ses techniques de mémorisation, le champion a fait référence à la technique universelle qui remonte aux Grecs. Il s’agit de créer une image de quelque chose que l’on veut se mémoriser et par la suite d’en constituer des histoires. "Par exemple, si je veux me souvenir de votre nom, Romain Scotto, je vous imagine avec un casque romain, et pour Scotto, je vous vois sur un scooter. Voilà. Après, pendant l’épreuve, je vous revisualise. Comme c’est moi qui ai choisi l’association, c’est plus facile. J’associe aussi les chiffres à des images. Pareil pour les cartes. Par exemple la dame de cœur est pour moi la Princesse Diana.", explique Pierre B.
Dans la foulée, le juriste a précisé l’importance de l’entraînement. Il précise "voilà. C’est un entraînement, comme la course à pied. Il me faut aucun bruit autour. Je m’isole avec un casque. C’est un exercice qui demande beaucoup de concentration. Il faut dégager au moins deux heures. J’imprime ma liste de chiffre que je mémorise pendant une heure. Après, je les restitue sur une feuille vierge. Pareil avec les paquets de cartes."
Par ailleurs, le champion de la mémorisation déconseille le par cœur, une méthode qu’il qualifie de "bête et méchant comme ce qu’on apprend à l’école." Et de poursuivre : "je pense qu’il y a une révolution à faire pour apprendre aux gens à apprendre différemment."
Lorsqu’on lui a posé la question "à quoi cela vous sert ?", Pierre B. répond : "dans la vie de tous les jours, pas à grand chose. Mais il y a tout un tas d’applications possibles. Pour les études par exemple, quand il faut apprendre des dates. Vous pouvez apprendre des formules de maths, du vocabulaire dans une langue étrangère. Si on me donne un numéro de téléphone quand je conduis et que je ne peux pas noter, là, je m’en sers. Six chiffres, c’est de la rigolade."
Toutefois, le champion ne pense pas avoir un don. "Je suis scientifique de formation mais je n’étais pas un élève spécialement brillant. J’étais dans la moyenne. Plusieurs champions n’ont pas le bac. Je n’ai pas de cerveau plus développé. Après, il faut savoir que l’entraînement fait travailler des parties du cerveau que quelqu’un d’ordinaire n’utilise pas. Ce n’est pas une question d’intelligence, mais d’imagination. On peut avoir de bons résultats qu’on soit âgé ou jeune. Mais on progresse plus vite plus jeune." a-t-il précisé.
"Quand on sort des championnats qui se déroulent sur trois jours, vous avez la tête dans du coton. Vous n’arrivez plus à additionner 2+2. " confie Pierre B. quand on lui a demandé s’il avait des maux de tête.
Et lorsque son correspondant lui demande qu’on devait parfois le prendre pour un psychopathe, il n’hésite pas à dire : "c’est clair que ça pourrait être utilisé de façon malveillante. Dans la rue, vous sortez votre carte bleue au distributeur, je peux mémoriser les 16 chiffres de votre carte et quelques secondes. Si j’étais malhonnête je pourrais le faire."
Pour conclure, le journaliste avait demandé à Pierre B. de réciter l’intégralité de l’interview. Avec une note d’humour, il répond : "vous savez, pour retenir les informations, il faut le vouloir. Il faut que je me concentre. De façon naturelle, c’est impossible sauf pour les autistes, les synesthètes. Ce sont des cas médicaux."