Si les ventes de disques attestent que le rap est apprécié par les français, les gros médias boycottent le genre.
Le paradoxe est évident, constate Le Parisien. Au point de vue commercial, la France représente le deuxième marché mondial du rap derrière les Etats-Unis. Des artistes ont réalisé des scores remarquables cette année : Soprano est resté numéro un du top deux semaines de suite et Booba s’est retrouvé instantanément en tête des ventes.
"La Cuenta" de Rohff, dans les bacs depuis la semaine dernière pourrait aussi être un bon cru, tout comme les opus de Sexion d’Assaut, qui restera comme l’un des plus gros succès de l’année, tous genres confondus. À côté de cela, TF1 a totalement ignoré le phénomène dans son émission "la Chanson de l’année".
Au milieu de Zaz, Mylène Farmer, Joyce Jonathan ou Marc Lavoine, il n’y aura aucun rappeur français. "A vrai dire, on n’y a même pas pensé", admet Christophe Henriet, directeur des variétés et des divertissements de TF1. Même tendance chez NRJ, première radio musicale de France. "Ce ne sont pas des artistes que l’on diffuse actuellement", confirme Morgan Serrano, directeur des programmes de la station
Les arguments sont polis, mais paraissent peu honnêtes, selon les observateurs. " C’est une conspiration médiatique, un dégoût du banlieusard et de l’immigré", dit Olivier Cachin, journaliste spécialiste du hip-hop. Il pense qu’il s’agit d’une ségrégation musicale mais aussi sociale avec, derrière cela, l’idée de ne pas se brouiller avec un public craintif.
Le genre a beau s’être industrialisé, il fait donc toujours peur. "Notre public, c’est la famille au sens large. Après une journée de travail, on n’a pas envie de se plonger dans quelque chose de difficile comme le rap", soutient Christophe Henriet de TF 1. Morgan Serrano ajoute que quand on programme du hip-hop, il y a parfois des phénomènes de rejet.
Aux Etats-Unis, les médias beaucoup déroulent le tapis rouge aux stars du genre comme Jay-Z ou Kanye West. En France, cela semble fait fuir les publicitaires, qui ne veulent pas être associés à des rappeurs portant pourtant leurs vêtements ou leurs baskets. La distance se creuse entre la vitrine médiatique et la réalité sociale.