Un documentaire sur l’infidélité a été diffusé par France 5, hier soir. François de Singly, sociologue spécialiste de la famille, s’est exprimé sur les évolutions récentes de la relation de couple.
Une neurobiologiste raconte une expérience sur des rats dans le documentaire. Un rat a une relation sexuelle plusieurs fois de suite avec une rate, puis son activité s’estompe, comme s’il était fatigué. Mais lorsque l’on lui présente une nouvelle rate, la copulation multiple reprend.
"On sait que les rats sont très proches d’un point de vue biologique des humains", assure François de Singly, interrogé par le site metronews.fr. Mais alors, la fidélité sexuelle est-elle compatible avec l’espèce humaine ? Au 19è siècle, on demandait fidélité à la femme, pour qu’il n’y ait pas de bâtard. On ne se sait pas comment cette norme qui servait à connaître l’origine de l’enfant est devenue une norme d’amour.
La norme d’aujourd’hui
Après 1968, on a pensé que les choses allaient redevenir comme avant, mais cela n’a pas été le cas. Aujourd’hui la fidélité sexuelle s’est inscrite dans le mariage comme une preuve d’amour. La norme aujourd’hui c’est très clairement l’exclusivité sexuelle.
A la question "Qui est le plus infidèle aujourd’hui : l’homme ou la femme ?", François de Singly répond que les hommes peuvent accepter de faire l’acte sexuel sans amour, tandis que les femmes sont plus nombreuses à demander des preuves de cet amour. Même si au bout de quelques années, les femmes peuvent s’accommoder de l’infidélité de leur mari si elles n’y voient pas d’engagement affectif.
"Les femmes sont sûrement un peu plus infidèles qu’avant", selon François de Singly "mais la nouveauté n’est pas là". "Elle est plutôt dans le fait qu’une femme peut s’autoriser à avoir des “sex-friends” entre deux relations. Et là, elles dissocient le sexuel de l’amoureux".
Le changement de l’amour dans une société qui se masculinise
On dit toujours que la société se féminise, mais là elle se masculinise, du point de vue du sociologue. A terme, si les femmes s’habituent à la diversité, elles auront peut-être du mal à adopter la fidélité conjugale. Mais pour l’instant cette évolution se fait seulement en dehors du couple. S’il y a transformation du modèle, cela pourrait venir aussi des couples homosexuels, qui dissocient plus facilement infidélité sexuelle et infidélité amoureuse. Mais le sociologue soutient qu’il n’y a pas le même rapport au sexe dans certains pays.
Selon François de Singly, c’est sûr que l’amour en Occident est une version particulière de l’amour. La relation amoureuse exclusive est présente au théâtre, dans le cinéma, dans les romans. C’est cette culture qui a façonné notre vision de l’amour.
Plusieurs logiques coexistent : la logique masculine machiste, c’est celle de la chasse, c’est le registre du rat, l’argument de la nature. Pour les femmes, c’est le "jardin secret". "Une logique très féminine, d’émancipation, pour éviter d’être contrôlées par leur compagnon. Cela nuance l’idée d’une masculinisation des relations amoureuses, car les femmes ont un argumentaire propre", conclut François de Singly.