Avec la baisse du nombre de requins pêchés observée sur les quatre dernières années, les associations attendent le feu vert des institutions pour activer les sécurisations nécessaires à la pratique du surf. Dans quelques temps, une zone d’expérimentation à Saint-Leu pourrait se démocratiser sur les autres spots de l’île. En l’attente, les surfeurs réunionnais continuent de braver la vague sur les spots mythiques de l’île.
L’annonce, en apparence anecdotique, a de quoi décourager l’association du Saint-Leu Surf Team. Dans un communiqué, la mairie de la commune de Saint-Leu indiquait ce vendredi qu’elle attendait “des clarifications” avant de donner son aval à l’expérimentation d’une zone de surf modulable sur les spots saint-leusiens.
Le projet, porté par le Saint-Leu Surf Team et déjà approuvé par le CSR, pourrait changer la donne sur les spots de l’île. Dans les grandes lignes, une “water patrol” qui moyenne jet-skis et bateaux sera déployée aux abords des spots où les conditions sont optimales pour le surf. En appui, un dispositif de pêche au large et des caméras disposées dans les fonds pour évaluer la fréquentation des requins seront mis en place. Seuls les surfeurs disposant d’un équipement de protection individuel de type “shark shield” pourront toutefois se mettre à l’eau.
“Nul besoin de parler d’encadrement” tempère Gilbert Pouzet, président du Saint-Leu Surf Team. Étalée sur les spots mythiques ayant fait la réputation de la “gauche” de Saint-Leu, ces patrouilles nautiques auront vocation à “atténuer le risque requin et intervenir en cas d’urgence” comme le rappelle Gilbert Pouzet. Les water patrols sont désormais prêtes pour être déployées sur les spots du cimetière, de la pointe au sel ou encore des tortues. “On aurait pas pu ouvrir le 19 car notre matériel vient tout juste d’arriver sur l’île” fait valoir le président du Saint Leu Surf Team.
Une tranche de 9 employés affectés aux water patrols a déjà été embauchée fin novembre et sera complétée par trois personnes entre février et mars. Le dispositif, qui tend à être expérimenté sur les spots précédemment nommés, pourraient être déployés sur d’autres vagues dont celle de Trois Bassins. Sur la pointe, nombreux sont les surfeurs qui pratiquent sans le dispositif de vigie requin en cette période de haute saison.
“On se surveille mutuellement” assure un pratiquant. Ce vendredi après-midi, on comptait une dizaine de surfeurs au pic du spot de trois bassins, mais pas de vigie requin en vue. “Le surf commence à retrouver ses pratiquants à La Réunion, de plus en plus de gens se mettent à l’eau malgré l’interdiction” poursuit un vendeur spécialisé dans les équipements de surf.
Si le Centre de sécurité requin appelait cette semaine à la vigilance suite à la capture de trois requins bouledogues aux abords des côtes ouest de la Réunion, le dernier bilan confirme une baisse continue du nombre de requins pêchés depuis 2016. “C’est ce qui avait été observé ailleurs dans le monde avec la pêche préventive en Australie ou en Afrique du sud. On a d’abord des captures importantes de requins bouledogues et puis ça baisse jusqu’à arriver à un niveau très bas. Ce sont des animaux philopatriques, les femelles accouchent là où elles sont nées et sont fidèles aux sites côtiers, les problèmes de marquage l’ont mis en évidence.” retrace David Guyomard, responsable scientifique du programme de pêche de prévention à La Réunion.
Carte à l’appui, le bilan de 2020 permet d’affirmer que la plupart des prises sont recensées aux deux extrémités de la réserve marine. La dernière attaque de requin mortelle remonte au 9 mai 2019 à Saint-Leu. Un surfeur avait été attaqué à la cuisse, et était décédé des suites de ses blessures. Aujourd’hui comme rappelé par le CSR, la pêche préventive budgétisée à environ 800 000 euros par an vise à intercepter les requins dangereux qui “maraudent près des zones d’activité”. Saint-Leu cumule depuis mars 2018 4 captures de requins bouledogues et 22 captures de requins tigres, soit respectivement 9% et 12,5% des captures totales du programme.
Désormais, l’enjeu du déploiement des palangres dans les zones de protection renforcée est “important” selon le CSR, qui assure avoir “montré toutes les garanties de protection des espèces dans ces zones”. Du côté des surfeurs, la création d’un périmètre dérogatoire à l’arrêté préfectoral repose sur les communes, décisionnaires en la matière, le CSR ayant déjà donné un avis favorable.