Le 27 février dernier, une mère de famille, de nationalité comorienne, a été arrêtée dans la chambre de sa fille, hospitalisée au Chu de Saint-Denis. Un fait dénoncé par La Cimade et Médecins du Monde.
Le 27 février une mère de famille, Hamadi* de nationalité comorienne, a été arrêtée par la police alors qu’elle se trouvait dans la chambre de sa fille, hospitalisée au Chu de La Réunion.
Selon la Cimade et Médecins du monde, il y a eu "une confusion croissante entre le soin et le contrôle migratoire".
Sa fille, gravement malade, et âgée de 11 ans, est transféré des Comores au Chu de La Réunion pour recevoir des soins essentiels, précise Médecin du Monde dans un communiqué. Pour accompagner sa fille, la maman se voit délivrer un Visa par la France.
Alors qu’elle s’absente de l’hôpital, elle fait l’objet d’un signalement par le CHU le 23 février, rapporte Médecin du Monde.
"Le 27 février 2023, la maman est soumise à un contrôle d’identité dans la chambre d’hôpital de son enfant. Au sein du Pôle Famille/Enfance du CHU, en pleine après-midi, les agents de la Police Aux Frontières la contrôlent puis l’interpellent", indique Médecin du Monde et la Cimade.
Hamadi est alors conduite au Centre de Rétention Administrative en vue de son expulsion. Sa fille de 11 ans, dont l’hospitalisation touche à sa fin, est alors placée à l’Aide Sociale à l’Enfance (ASE) et confiée à une famille d’accueil ce même jour, rapportent conjointement les deux associations dans leur communiqué.
Hamadi est libérée 4 jours plus tard par le juge des libertés et de la détention ; selon les associations, une ordonnance délivrée le 3 mars indique que , "le contrôle d’identité de Madame [Hamadi] est entaché d’une irrégularité qui porte atteinte à ses intérêts dès lors que ce contrôle n’a pas été effectué dans les conditions légales, et de surcroît, selon un procédé déloyal caractérisé par une interpellation au sein du CHU”. C’est la raison pour laquelle Hamadi a été libérée.
Selon Médecins du Monde et la Cimade, "la PAF (ndlr Police aux frontières) a agi sur la base d’informations recueillies “lors d’un entretien social réalisé par le CHU de La Réunion”, comme l’indique la décision préfectorale du 28 février 2023 portant obligation de quitter le territoire français."
D’après les organisations, en communiquant ces informations, le secret médical et la confidentialité de l’accompagnement social "sont gravement entachés".
La Cimade a contacté la Direction de l’hôpital et les différents services compétents mais ils n’ont pas eu de réponse jusqu’à présent.
Pour Médecins du Monde et La Cimade "ces mauvaises pratiques portent atteinte au droit fondamental qu’est le droit à la santé, indépendamment de la nationalité, du genre, du sexe, de l’âge, et du lieu de vie des personnes. Nous espérons rappeler la fonction première de l’hôpital public et du ministère de la santé : accueillir, soigner. Les espaces de soins se doivent d’être et de rester des lieux refuges pour les personnes malades, et non l’antichambre de l’enfermement et de l’expulsion des pouvoirs régaliens
Intervention "pour défaut de titre"
Interrogée sur cette situation, la préfecture réagit. "La ressortissante comorienne était venue initialement à La Réunion pour accompagner sa fille mineure en Evasan. Les services de l’hôpital ont par la suite signalé à la préfecture qu’elle n’est pas revenue chercher sa fille à la fin de ses soins. Son visa étant arrivé à échéance, elle était donc en situation irrégulière et a fait l’objet d’une OQTF", explique-t-on.
"5 jours plus tard, sa présence a été signalée à l’hôpital", rapporte la préfecture. "L’intervention de police visait à l’interpeller pour défaut de titre et la placer en centre de rétention administrative", conclut-elle.
La réaction du CHU de La Réunion :
Le CHU de La Réunion tient à réagir face à la publication du communiqué de presse de la CIMADE et de Médecins Du Monde. La démarche visant à simplifier, voire caricaturer à l’extrême cette situation est choquante pour les équipes hospitalières ayant géré cette situation avec responsabilité, et dans l’intérêt de l’enfant, durant plusieurs semaines. La prise en charge de cette enfant relevait d’une orientation directe des Comores décidée et prise en charge financièrement par l’Ambassade de France aux Comores, et non du dispositif des EVASAN. Cette enfant avait terminé son parcours de soins et était dans l’attente de son retour aux Comores accompagnée de sa mère, une fois opérée avec succès au CHU.
Quelques jours après avoir verbalisé son refus de retour, la mère a quitté le logement extérieur à l’hôpital du CHU en prenant toutes ses affaires, logement financé intégralement par l’Ambassade, laissant l’enfant seule. Il est ainsi faux d’affirmer que l’enfant était hospitalisée. L’enfant a alors dû être mise à l’abri et hébergée au sein du service de pédiatrie du CHU Sud afin de garantir sa sécurité, le temps d’informer Procureur de la République conformément aux textes. Devant la gravité de la situation, des mesures fortes de protections de l’enfant ont été décidées par le Procureur de la Republique, qu’il ne revient pas au CHU de divulger car relevant de l’autorité judiciaire.
Lorsque la maman est revenue dans le service de soins, sans aucun commentaire, le service de soins a prévenu la direction, afin de garantir la sécurité de l’enfant. La situation relevant de l’Ambassade de France, le CHU l’a informé du retour de cette maman. Le CHU n’est pas intervenu au-delà de cette situation de gestion de la protection de l’enfant. Le CHU rappelle, au-delà des pétitions de principe et de postures théoriques, qu’il accueille et accompagne, en soins et socialement, chaque année plusieurs centaines de patients en transferts sanitaires des pays de la zone et de Mayotte.
Tous les patients accueillis au sein des services de soins, mais aussi au sein des PASS, particulièrement mobilisées dans l’accueil des patients étrangers en situation de précarité et de rupture de soins, sont accueillis quelles que soient leurs situations et nationalités, et qu’aucune déclaration des situations des patients du CHU au regard de la régularité de leur séjour n’a jamais été faite aux forces de l’ordre par les équipes soignantes ou la direction du CHU.
Les propos de la CIMADE et de Médecins du Monde sont abusivement polémiques et ne correspondent absolument pas à la réalité de la situation, ni à la réalité de l’accueil inconditionnel des patients au sein du CHU.
*nom d’emprunt