Le 23 février 2020, la frégate de surveillance Nivôse fait route vers le Port des Galets, après 6 semaines de déploiement aux Terres australes et antarctiques françaises (TAAF) quand, à 1 400 milles nautiques - 2 600 km – de là, une pathologie nécessitant une prise en charge hospitalière immédiate est diagnostiquée à un agent du district de l’archipel de Crozet.
Or, la base Alfred-Faure, située au-delà des redoutables 40e rugissants, ne se prête pas à des soins durables. Son médecin rend donc compte de sa volonté de l’évacuer au plus vite.
Dans les minutes qui suivent, la préfète et administratrice supérieure des TAAF, Madame Evelyne Decorps, sollicite le général Yves Métayer, commandant supérieur des forces armées dans la zone sud de l’océan Indien (COMSUP FAZSOI), afin de recourir au Nivôse. En effet, grâce à un ravitaillement en carburant consenti durant sa patrouille par le district de Kerguelen, quinze jours plus tôt, la frégate possède l’allonge nécessaire pour intervenir beaucoup plus rapidement qu’un navire civil. De surcroît, son hélicoptère Panther embarqué, capable de parcourir 500 km à 250 km/h tout en emportant une civière et un médecin, rend possible une évacuation par tous les temps. Enfin, la présence à bord de deux médecins militaires et d’une infirmière garantit une surveillance médicale continue durant le transit vers La Réunion.
Sitôt la décision prise, la frégate se déroute, ses machines poussées aux limites de leurs capacités ; l’état-major du Nivôse, assisté par les météorologues de la Marine nationale, entrevoit une fenêtre de beau temps : si le Nivôse atteint l’archipel avant le jeudi 27 février, alors le délai de prise en charge du patient à Saint-Denis pourra être réduit de 12 à 9 jours, le Nivôse échappant à plusieurs perturbations d’ampleur. Ce scénario optimal devient possible quand le général Métayer accorde au bâtiment une dérogation exceptionnelle, l’autorisant à exploiter la quasi-intégralité de ses réserves de combustible pour accomplir cette évacuation d’urgence.
En moins de 72h, à 13h00 le mercredi 26 février, le Nivôse se trouve à 130 milles nautiques - 250 km - de Crozet, à portée d’« Hélios » - l’indicatif du Panther -, allégé et médicalisé pour l’occasion afin d’optimiser sécurité, vitesse et endurance. A 13h40, le patient est pris en charge à l’héliport d’Alfred- Faure, et apponte sur le Nivôse à 15h40. Immédiatement placé sous surveillance médicale constante, le patient demeure stable tout au long du transit. La frégate n’en poursuit pas moins sa course contre la montre pour rallier au plus vite La Réunion, 1 400 milles nautiques au nord. A l’aube du dimanche 1er mars, le Panther prend les airs, et dépose son protégé à l’hôpital de Saint-Denis.
Mission accomplie : le patient atterrit moins de 7 jours après la demande d’évacuation, bien au-delà de toutes les espérances initiales. Un succès rendu possible par des conditions météorologiques clémentes, certes, mais surtout par la coordination des acteurs de la chaîne de décision opérationnelle, de l’état-major jusqu’à la salle des machines du Nivôse. Un beau succès pour les marins de la frégate de surveillance et, au-delà, pour l’ensemble des forces armées de la zone sur de l’océan Indien, ces 1 700 militaires voués à protéger depuis La Réunion et Mayotte le territoire et les citoyens français, ainsi qu’à à coopérer avec les nations amies de la France.