À bientôt 60 ans, Salifa nous parle de son quotidien, celui d’une ramasseuse de bouteilles en verre vides. Un choix, un passe-temps mais avant tout un complément de ressources car il est difficile pour elle de trouver un travail. Mais Salifa, mère de famille divorcée refuse de demander de l’aide.
"Je m’appelle Salifa, je ramasse les bouteilles et je n’ai pas honte"
Voilà les mots que Salifa 58 ans utilise pour se décrire en toute humilité. Cela fait 4 ans qu’elle ramasse les chopines vides des Brasseries de Bourbon et de la Sorebra.
"Il faut rode dan zerb, partout là na bouteilles", explique Salifa tandis qu’elle remonte une rue du Chaudron le sachet à la main. À La Réunion, il y a plus de 1 000 ramasseurs et ils seraient 3 ou 4 a se partager le quartier du Chaudron.
"Cet la arrive premier dessus i prend. Chacun a besoin zot bouché mangé ou comprend ?", raconte la ramasseuse qui précise ne pas être du genre à se battre pour une chopine, selon elle ça n’en vaut pas la peine.
"Là si ou gagne 3 bouteilles c’est bien au lieu ou gagne pas du tout ! Cossa ou dit ou ?", plaisante Salifa.
Elle garde le sourire. Pourtant cette mère de 6 grands enfants, allocataire du RSA, n’a pas eu une vie facile. Et son passe-temps, ce petit travail n’est pas toujours bien vu.
"Des fois des mounes i dit a ou comme ça ’vous êtes sale, faut pas dit azot bonjour’ faut pas nous dire ceci ou cela", déplore la mère de famille.
Elle ajoute : "Les bouteilles c’est sale, toute demoune i boit avec la bouche et ou koné lé pas propre." Salifa a d’ailleurs du demander des piqûres contre le téthanos et d’autres maladies pour se protéger.
Cette activité n’a pas que de mauvais côtés puisqu’avec le temps, Salifa s’est fait des amis. Un bar du Chaudron est devenu son repère, là-bas les gens lui donne directement leurs bouteilles vides maintenant qu’ils la connaissent.
Dans ce bar, le sac de la ramasseuse se remplit à vue d’oeil avant de repartir faire un tour du quartier.
"Mi ramasse un peu partout, partout. Si na point na point. Des fois i gagne, des fois i gagne pas du tout", explique Salifa.
Elle sillonne le Chaudron jusqu’à Deux Canons, le plus souvent en bus, et s’arrête dés qu’elle repère une précise chopine.
"La bientôt mi va arrêter, mon garçon la dit amoin arrête parce que les épaules i tient plus. C’est le bras qui tire le chariot i tient plus."
À 16 heures, Salifa à presque fini sa journée et le butin du jour semble satisfaisant. "Na un mélange de bière. Mais mi lé contente pour un journée depuis grand matin."
La Sainte-Marienne à ensuite rendez-vous avec l’entreprise de collecte. Sur l’île, il y a une dizaine de recycleurs partenaires des Brasseries.
Chaque sac de recyclage contient une centaine de chopines. Salifa en a donné 15 et selon les calculs elle devrait recevoir environs 80 euros pour un mois de travail.