Globice mène depuis 2004 des suivis en mer pour recenser les baleines à bosse fréquentant les eaux de La Réunion durant la saison de reproduction. Les effectifs varient de manière significative d’une année sur l’autre.
L’association Globice mène depuis 2004 des suivis en mer pour recenser les baleines à bosse fréquentant les eaux de La Réunion durant la saison de reproduction. Les effectifs varient de manière significative d’une année sur l’autre.
L’effort de prospection de Globice cet hiver austral a pâti de conditions météorologiques particulièrement peu propices aux sorties en mer (épisodes de fortes houle, vents forts réguliers). 101 sorties en mer, équivalentes à 365 heures de prospection, ont malgré tout pu être programmées sur la saison grâce notamment à l’implication des capitaines et bénévoles de Globice.
Cet effort de prospection sur la saison 2020 a permis d’identifier 54 baleines à bosses de juin à octobre dans les eaux réunionnaises. C’est moins que les 91 baleines recensées l’année dernière et beaucoup moins que les 292 baleines de l’année 2018. Mais tout de même plus qu’en 2016 avec 10 baleines recensées seulement.
Les années 2017 et 2018 figurent comme des années records en termes de fréquentation des baleines à bosse à La Réunion.
Pour 2020, la fréquence d’observation s’établit à 0,299, soit une valeur très proche de 2019. Il en est de même quant à la distribution des baleines en 2020, proche de celle de 2019, avec une concentration des observations devant Saint Gilles.
Les causes de cette variabilité inter-annuelle restent méconnues. Plusieurs hypothèses ont été émises comme l’impact de la quantité de nourriture disponible sur la migration ou l’utilisation d’autres zones de reproduction d’une année sur l’autre.
Globice explore différentes hypothèses qui pourraient expliquer ces fortes variations d’une saison à l’autre. La piste étudiée est celle d’un lien entre l’abondance de krill (source principale d’alimentation des baleines à bosse) en Antarctique et la capacité des baleines à bosse à migrer vers les eaux chaudes pour mettre bas
et s’accoupler.
En effet, pour comprendre les causes de ces variations, Globice a en effet analysé différentes variables environnementales qui pourraient influencer le cycle du krill (température de l’eau, abondance de chlorophylle, salinité de l’eau, indice El Nino, etc.) qu’elle a comparé à la fréquence d’observation des baleines à bosse de La Réunion.
Les résultats préliminaires des modélisations ont montré une influence potentielle de la concentration en chlorophylle A en Antarctique, sur la fréquentation des baleines à bosse à La Réunion 30 mois après.
A la base de la chaine alimentaire, la chlorophylle A constitue la principale ressource alimentaire et énergétique du krill consommé par les baleines.
Ainsi, de faibles concentrations en chlorophylle A pendant les étés australs de 2012/2013 et
2013/2014 dans différentes zones Antarctique pourraient expliquer, du moins en partie, le faible niveau de fréquentation des baleines à bosse observé à La Réunion, et plus généralement sur les sites de reproduction du Sud-Ouest de l’océan Indien, en
2015 et 2016.
Bien que le modèle ne soit pas véritablement prédictif en raison de la disponibilité tardive des données, Globice a tenté l’exercice d’appliquer son son algorithme pour estimer la fréquentation pour l’année 2020. Comme l’atteste le graphique ci dessous, le résultat se situe dans la fourchette prévue par l’un des deux modèles et s’approche des valeurs des plus faibles niveaux de fréquentation de ces dernières années.
L’absence presque totale de groupes compétitifs (groupes composés d’au moins deux mâles
poursuivant une femelle en vue de s’accoupler) cette année explique a posteriori un profil de saison moins spectaculaire des observations sur le plan d’eau où les sauts des compétiteurs pour s’attirer les faveurs des femelles ont été moins nombreux.
En revanche, les baleines à bosse observées cette année 2020 l’ont souvent été accompagnées de leur baleineau. Ainsi avec près de 54% des observations dans ce cas de figure, la saison 2020 est l’une des saison où le plus de mère-baleineau ont été observés depuis 2004.
Le profil de la saison 2020 s’apparente à celui de 2019 (et dans une moindre
mesure à 2012) : une première baleine identifiée mi-mai (à Saint-Leu), des signalisations de plus en plus nombreuses malgré une météo défavorable en juillet, un pic d’observation durant les trois premières semaines d’août et des couples mère-baleineau isolés visibles de façon décroissante jusqu’à mioctobre.
La face ventrale de la caudale des baleines à bosse présente des caractéristiques uniques qui permettent d’identifier chaque individu et d’effectuer des « recaptures », d’une saison à l’autre ou d’une île à l’autre dans l’océan Indien.
Le catalogue de photo-identifications que Globice gère et enrichit chaque saison à La Réunion compte, pour la période 2001-2019, 1663 individus différents, identifiés d’après leur nageoire caudale. Sur ces 1663 baleines à bosse, seuls 44 individus ont été observés sur au moins deux années, ce qui montre un taux de fidélité très faible au site de La Réunion.
Cette saison 2020 s’avère globalement dans la moyenne en termes de « recaptures photographiques » avec le retour de 5 baleines : Uvale, Nairobi, Jigsaw, (toutes trois observées en 2017), Rhum (déjà photoidentifiée en 2009 et 2011) et Phlegmont (photoidentifiée en 2018).
Le programme de Sciences Participatives « KODAL » permet à tout photographe extérieur à Globice d’alimenter le catalogue de nageoires caudales de baleines à bosse migrant chaque saison à La Réunion durant l’hiver austral. Seize personnes ont participé cette année au suivi scientifique en envoyant leur cliché, contribuant à l’identification de deux baleines que les équipes de Globice n’avaient pas croisées.