Kénaelle est une jeune auteure, compositrice et interprète Réunionnaise de 25 ans. C’est une métisse qui aime aimer et, pour qui, la famille est essentielle. Dieu occupe une place importante dans sa vie et elle dira, avec Corneille, que le bon dieu est une femme. Elle nous livre ce qu’elle a sur le cœur…
En ce 8 mars où l’on célèbre la journée internationale des femmes, faisons mieux connaissance avec une jeune réunionnaise qui porte le combat des femmes réunionnaises dans ses chansons.
Son nouveau clip « 𝑴𝒊 𝒚𝒊𝒏𝒎 𝒂𝒐𝒖 » sera disponible, ce vendredi 11 mars, sur les plateformes en ligne. « 𝑴𝒊 𝒚𝒊𝒏𝒎 𝒂𝒐𝒖 » est, rappelons-le pour ceux qui ne savent pas, le cover en créole de « Je t’aime de ouf » de Wejdene ?
Ce clip fait tout simplement suite à l’attente du public concernant la vidéo que Kénaelle avait posté à la fin de l’année dernière sur les réseaux sociaux. "En effet, je m’étais filmée chantant cette reprise à la guitare. Et en moins de 24h, la toile s’est enflammée, avec plus de 200k vues et partages. C’était fou ! Du jamais vu, et ce, même sur mes propres compositions", affirme-t-elle.
Kénaelle est une jeune femme de 25 ans et qui, comme elle l’explique, a pas mal galéré dans la vie. C’est sans doute pour cela, d’ailleurs, que la sensibilité prône dans ses chansons.
"Je me suis construite en prenant les points positifs de chacune des situations difficiles que j’ai eu à subir : le harcèlement scolaire quand j’étais enfant, le rejet et la peur de mal faire, les médisances, les critiques... Tout cela a forgé chez moi un mental d’acier qui fait de moi ce que je suis aujourd’hui : une femme forte, ambitieuse, qui sait ce qu’elle veut et ce qu’elle ne veut plus", clame-t-elle.
Depuis quelques années, Kénaelle est d’avis que la place des femmes dans la société a beaucoup évolué à la Réunion. "Les femmes osent et trouvent leur place petit à petit. Et, pour ma part, j’aimerais voir encore plus de femmes s’affirmer et monter en puissance."
Ce qu’elle déplore, cependant, ce sont toutes les violences contre les femmes. "On entend ça : féminicide", déplore-t-elle.
"A ces hommes, j’aimerais leur dire d’aller écouter la très belle chanson de Corneille Le bon dieu est une femme". Elle résume tout ce que je pense et tout ce que je n’aurais su dire. "Quand ce n’est pas une sœur, c’est une mère qui aime. Et quand ce n’est pas la mère, c’est l’épouse qui aime. Et quand ce n’est pas l’épouse, c’est une autre femme (...). Il faut être Dieu pour être trahie et aimer plus fort."
L’être humain a besoin d’interaction sociale et la famille est, pour elle, la première chose qui nous entoure dès notre naissance. "La famille, on ne peut pas vivre sans et on ne peut pas vivre avec", nous dit-elle.
"La famille est essentielle, et pas seulement la famille du sang, mais la famille qu’on crée avec la personne que l’on aime. Il y a aussi la famille que l’on choisit et qui est composée de nos amis les plus proches", explique Kénaelle.
"La famille, c’est difficile parfois car nous n’évoluons, parfois, pas dans la même époque et dans la même sphère. Mais la famille, c’est elle qui sera là lorsque le ciel te tombera sur la tête", soutien-elle.
En tout cas, c’est comme cela dans la sienne. Et, on est tout à fait d’accord avec elle. On se chamaille souvent mais dès lors où il y a besoin, on en oubli les soucis pour laisser place à la solidarité.
La figure maternelle est pour Kénaelle très importante car, dit-elle : "Dann tout kout-kony, promyé moun ou sa kriyé, momon minm…". Si elle a un message à faire passer au sujet de la famille, c’est de rester soudé. "De nos jours, la famille n’est plus ce qu’elle était. Alors, prenez soin de ceux qui comptent vraiment".
Effectivement Dieu occupe une place importante dans ses chansons et dans sa vie. Son parcours spirituel a démarré il y a quelques années. Même si elle a été dirigée vers la religion par sa famille, elle nous dit que plus le temps passe, plus elle lit et se documente, plus je tend vers la spiritualité plutôt que la religion.
“Comme je le dis dans ma chanson « Bondié », pour moi, il existe qu’une seule énergie, et les religions sont un support pour aider tout le monde à puiser dans cette énergie infinie. À la Réunion, c’est une chose banale, tout le monde se respecte. Et c’est beau. On peut entendre les tambours sacrés, les services kabarés, l’appel à la prière et les cloches des églises. Tout cela en même temps et sans que cela dérange qui que ce soit, très souvent. Mais dans le monde, c’est différent, et c’est dommage…”, souligne-t-elle.
L’Amour est, pour elle, universel. Et, elle brasse large. Il peut s’agit d’amour fraternel, maternel, amical, animal...
"Pour moi, l’Amour, c’est un sentiment puissant ; au delà de tous les autres sentiments qui peuvent exister. C’est le ciment entre deux âmes", explique-t-elle.
Et, elle poursuit : "L’Amour a une grande place dans ma vie, car j’aime la vie. J’aime aimer. J’aime la personne avec qui je partage mon quotidien. J’aime ma famille. J’aime mon métier. J’aime les choses simples de la vie. J’aime tout simplement."
Selon Kénaelle, l’amour c’est le soutien. C’est l’amitié. C’est voir le meilleur en chacun. C’est se donner pour l’autre sans aucune attente. C’est savoir recevoir aussi ce que l’autre nous donne. C’est faire de son mieux pour que la vie soit plus simple.
L’Amour, pour Kénaelle, c’est un lien fort entre deux âmes, peu importe leur physique, leur couleur, leur sexe. L’Amour est un sentiment avant d’être un idéal dans la société. "Et si j’avais un message à passer aux jeunes : n’idéalisez pas l’Amour. L’Amour est imparfait et c’est aussi ça son essence, voir l’extra dans l’ordinaire", poursuit-elle.
Le métissage est, pour Kénaelle, très important. Et, c’est là tout le charme de notre île, selon elle. Pour ce qui est de la musique, elle nous dit qu’elle a toujours voulu quelque chose qui lui ressemble.
"Étant métisse, avec des origines d’ici et d’ailleurs, il était normal, pour moi, de métisser mes compositions avec des influences indiennes car c’est la partie de mes origines avec laquelle je suis le plus liée", explique-t-elle.
En effet, Kénaelle a des origines très diverses. Son arrière grand-père vient de Pondichéry, son arrière grand-mère est chinoise, son grand-père est cafre, sa grand-mère est créole et ma mère est une malbaraise.
La chanson est, pour Kénaelle, un moyen de dire ce qu’on a sur le cœur. "Pour émouvoir, dénoncer, panser, toucher... c’est une véritable arme. La musique est mon médicament quotidien contre tous les bobos physiques, émotionnels et psychiques, mon moyen de me détendre", nous dit-elle.
Poursuit-elle un but à travers la chanson ? Si elle dit ne pas avoir de but prédéterminé, Kénaelle, indique qu’elle aimerait, tout simplement, que chacun puisse se retrouver dans sa musique, guérir leur maux, trouver la paix, poser des mots sur ce qu’ils ressentent, dire ce qu’ils n’osent pas ou trouver du réconfort. "J’aimerais que mes messages soient entendus, tout simplement", souligne-t-elle.
Quels projets a Kénaelle en réserve pour nous en 2022 ? Cette année est pour Kénaelle, ni plus ni moins qu’une renaissance après s’être consacrée à ses études pendant cette période de crise sanitaire. Elle a dû mettre la musique un peu de côté pendant un peu plus d’un an. "Je suis revenue l’année dernière avec Padèl après ce moment d’absence. Et, en 2022, je compte bien offrir à mon public une année remplie de chansons avec des reprises et des nouvelles compositions. Ils me verront, sans doute, sous différents angles : des chants qui dénoncent, des chants qui pansent, des chants qui font danser... Tout en gardant ma petite touche. Cette année : aucune limite, si ce n’est que le ciel (rires)", s’exclame-t-elle..
En tant qu’artiste, Kénaelle nous dit qu’il est difficile de vivre de sa passion. Alors, dans la musique, elle se laisse porter par la vague et elle va là où le vent l’emmène.
"Ce que j’aimerais dire aux acteurs du monde culturel, c’est que l’herbe n’est pas plus verte ailleurs. La Réunion néna son gayar !", soutient-elle.
"Pourquoi toujours valoriser l’ailleurs, alors que nous avons tout ici ? Je trouve dommage qu’on peine à nous faire jouer sur les scènes locales pour une question d’argent et que nous, artistes réunionnais, soyons mis en second plan ? Cela, alors même qu’on dépense des milliers d’euros pour faire venir des artistes d’ailleurs", s’interroge-t-elle.
"N’oublions pas que certains artistes ne vivent que de ça. La crise sanitaire a déjà fait beaucoup de dégâts dans le monde de la culture. Mèt an lèr nout kiltir, nout bann zartis, nout bann produi lokal, nout bann zantropriz péi, sak i done paké pou la Réunion", soutient-elle.