Du port du voile intégral à la polygamie, il n’y a visiblement qu’un pas si l’on en croit l’affaire qui est survenue en métropole. A la Réunion, le président de la mosquée du Port réagit et parle de " respect de la loi républicaine " ainsi que " de respect de la loi islamique ", s’il y a abus de prestations sociales.
La contestation d’un PV pour conduite sous niqab à Nantes a tourné, hier samedi, à la controverse politique. Cette affaire survient alors que le débat sur l’interdiction du voile intégral proposé par le gouvernement bat son plein.
Du côté droit, on applaudit la fermeté de Brice Hortefeux, ministre de l’Intérieur, qui remet en cause officiellement la nationalité française d’un mari polygame. Du côté gauche, on crie au loup et on parle aisément d’ " opération politicienne ".
De l’interdiction du port du voile intégral, le débat a donc basculé sur la polygamie et l’abus de prestations sociales qui en découlerait. Quoi qu’il en soit, l’affaire fait couler beaucoup d’encre, à la Réunion également, une île où la communauté musulmane est largement représentée.
En France, il y aurait 20 000 familles polygames, ce qui est normalement interdit sur le territoire national. Aux Comores, par exemple, la pratique est reconnue seulement pour des raisons sociales et culturelles et elle a tendance à diminuer selon le président de la mosquée du Port.
" Aujourd’hui, la femme est beaucoup plus indépendante, aussi bien moralement, physiquement que professionnellement, on a donc tendance à diminuer cette proportion de polygamie, sans trop me tromper, on devrait être en dessous de 10% dans les îles Comores ", confie-t-il.
Et quand, à la demande d’une députée UMP, Chantal Brunel, on parle de recensement des familles polygames, cela suscite bien des interrogations du côté de la communauté comorienne à la Réunion. Elle met notamment en avant la nécessité de respecter la loi républicaine.
" Si cette personne-là a été déclarée polygame, et qu’elle bénéficiait des prestations sociales sachant que la polygamie est interdite en France, tout cela c’est interdit par la loi républicaine et interdit par la loi islamique parce qu’il y a abus, il y a tromperie de la part de celui qu’on croit être musulman ", souligne le président de la mosquée portoise.
Il ne cache pas sa peur d’un amalgame. " On est parti du voile, on aboutit à la polygamie, mais j’ai peur qu’on enferme une société, une communauté pour en faire une chasse aux sorcières, un bouc-émissaire ", termine-t-il.
Comment peut-on être déchu de la nationalité française ?
Selon l’article 15 de la Déclaration universelle des droits de l’homme, " tout individu a droit à une nationalité " et " nul ne peut être arbitrairement privé de sa nationalité ". Un Français de naissance ne peut être privé de sa nationalité. La déchéance ne vise donc qu’une catégorie de Français. Mais les conditions requises pour qu’un Français par acquisition soit déchu de sa nationalité sont elles-mêmes strictement encadrées par l’article 25 du code civil, qui cite cinq motifs possibles :
1. S’il est condamné pour un acte qualifié de crime ou délit constituant une atteinte aux intérêts fondamentaux de la nation.
2. S’il est condamné pour un acte qualifié de crime ou délit prévu et réprimé parle chapitre II du titre III du livre IV du code pénal.
3. S’il est condamné pour s’être soustrait aux obligations résultant pour lui du code du service national.
4. S’il s’est livré au profit d’un Etat étranger à des actes incompatibles avec la qualité de Français et préjudiciables aux intérêts de la France.
5. S’il a été condamné en France ou à l’étranger pour un acte qualifié de crime par la loi française et ayant entraîné une condamnation à une peine d’au moins cinq années d’emprisonnement.