La semaine dernière, une enseignante de l’école Félicienne-Jean, à Saint-André, a été menacée de mort par un parent d’élève. Une expérience vécue comme "traumatisante" par l’intéressée. Une agression qui n’est pas isolée. Selon les chiffres du rectorat, les cas d’agressions verbales sont en forte hausse cette année dans les établissements de l’île.
En 2021, il y a eu 55 cas d’agressions verbales à l’égard du personnel dans les écoles de l’île. C’est 20 de plus que l’année précédente. Une hausse marquée qui pourrait trouver sa source dans la crise sanitaire dans laquelle nous vivons actuellement, selon le rectorat. “Depuis la situation COVID, il y a plus de situations de violences verbales pour notre personnel. Par exemple, des parents qui ne voulaient pas que leurs enfants portent le masque”, explique-t-on du côté du rectorat.
Agressions verbales
2021 : 55
2020 : 35
Agressions physiques
2021 : 13
2020 : 13
Harcèlement
2021 : 3
2021 : 3
Source : Rectorat de la Réunion
D’ailleurs, le rectorat croit qu’il est nécessaire de rappeler aux parents qu’ils doivent respecter les enseignants. "Dans les écoles, comme dans la vie, les gens sont de plus en plus tendus", explique-t-on. "Si on a un problème, on discute. On ne va pas frapper des gens."
Du côté du Syndicat national des écoles (SNE) 974, on dit avoir constaté une hausse des violences à l’égard du personnel des écoles. Jimmy Furcy, représentant du SNE et enseignant à l’école Félicienne-Jean, n’est pas étonné de ces chiffres. L’enseignante Saint-Andréenne agressée la semaine dernière était d’ailleurs l’une de ses collègues. C’est lui qui l’a poussée à porter plainte auprès de la police.
"Je ne suis pas étonné. Depuis un an, la tension est encore montée d’un cran dans les écoles, notamment en raison des mesures Covid", croit-il. "Les directeurs font de leur mieux pour communiquer et transmettre la communication de la hiérarchie. Mais dans la réalité, les parents voient que ça ne se passe pas comme on leur dit dans les médias. Et je pense qu’ils se sentent floués."
Pour lui, ces chiffres du rectorat sont la partie visible de l’iceberg. "C’est comme pour les violences contre les enfants. Les gens ne parlent pas et ne dénoncent pas. Je l’ai fait trois fois dans ma carrière et ça prend beaucoup d’énergie. Et on ne peut jamais prévoir le résultat. Mais je l’ai fait pour les autres. Beaucoup baissent les bras."
Il pense d’ailleurs qu’en cette période de crise sanitaire, les gens se sentent stressés. "Dans leur vie personnelle, les parents, les enfants sont stressés et ça se répercute dans l’école. Le fait de porter un masque en permanence ajouté aux contraintes du protocole, ça ne contribue pas à des relations sereines. C’est multifactoriel, mais la Covid n’a pas arrangé les choses."
Jimmy Furcy reconnaît tout de même une certaine "tendance de fond" concernant la violence dans les écoles. "La Covid a bon dos et il y a d’autres problèmes dans les écoles. Le manque de financement ou de personnel. La crise Covid est un accélérateur, un révélateur des problèmes qui existaient déjà."
L’enseignant pense néanmoins que la hiérarchie est de plus en plus sensible à ces agressions, surtout après le meurtre de Samuel Paty. "Mais j’entends de nombreux directeurs qui disent se sentir seuls face aux violences qu’ils subissent dans leurs établissements", conclut-il.