Plateforme audio, vidéo, applications inaccessibles, site d’achats… La Réunion est victime de ce que l’on appelle, le géoblocking. Une situation qui provoque des inégalités d’accès à certains sites et certains catalogues. Situation qui perdure et qui pourtant est interdite depuis 2018.
Pas d’accès aux mêmes films qu’en métropole, indisponibilité de certaines applications… La Réunion est victime d’inégalité en termes d’accès à certaines plateformes.
Une situation dont les Réunionnais sont conscients et qu’ils jugent scandaleuse, comme nous l’explique Maître Sulliman Omarjee, avocat en droit du numérique. "Les Réunionnais sont conscients de cette discrimination et avaient été les premiers à se plaindre. La Région avait même écrit à Google pour demander à ce que La Réunion soit pleinement intégrée comme terre d’Europe dans leur catalogue d’applications et faire cesser son exclusion en vertu du droit européen. J’avais même, pour le compte de la Région, directement interpellé le Ministère des Outres Mers de l’époque ainsi que l’ARCEP sur cette problématique qui pénalise les ultramarins !
Or La Réunion est toujours considérée comme une zone d’Afrique avec un accès restreint aux contenus Internet. Il faut mettre fin à cette discrimination et faire comprendre à tous les acteurs de l’Internet que La Réunion fait partie de l’Europe !"
Aucun DOM n’est épargné, pas même notre région. Or, depuis 2018, il existe un règlement européen sur le Geoblocking qui devrait être respecté par les différents opérateurs de plateforme.
"Ce règlement vise à ne pas laisser sur le carreau chaque territoire européen du marché numérique unique prôné par la Commission : il vise à éviter le cloisonnement du marché à travers les pratiques de blocages d’accès aux sites ou applications en ligne en fonction de la localisation géographique ou la nationalité de l’Internaute européen.. Un site Internet doit être accessible de la même manière par tout citoyen européen quelque soit son lieu de connexion, son adresse IP, son lieu de résidence, sa nationalité... Les territoires ultramarins sont donc directement concernés en ce qu’ils subissent des discriminations ! Appliquer un catalogue différent aux Réunionnais, c’est les exclure du marché unique numérique européen ! C’est inacceptable !", nous explique l’avocat.
Cette situation, l’homme de loi l’a juge comme scandaleuse. Pour exemple, la une plateforme vidéo estime que La Réunion est "politiquement un département français mais pas géographiquement". C’est pourquoi, le catalogue peut être différent entre la métropole et notre île, malgré un prix pourtant similaire. Même constat avec certaines applications indisponibles dans notre région.
"Pour les plateformes de streaming, la réponse juridique est différente : le règlement européen GEOBLOCKING ne s’applique pas aux services audiovisuels, afin de préserver rémunération des auteurs via la vente territoriale des droits audiovisuels. C’est contradictoire avec l’idée du marché numérique unique ! Toutefois un autre Règlement européen entré en application en 2018 prévoit la portabilité des contenus audiovisuel en ligne, mais ne résout pas pour autant le problème. Au contraire, il faut militer pour l’idée que lorsque des droits audiovisuels sont négociés pour la France, ils incluent automatiquement les territoire d’outre-mer de sorte que le catalogue soit le même qu’on soit à Paris ou Saint-Denis, Fort de France ou Pointe à Pitre.
En revanche, le règlement Géoblocking s’applique pleinement aux catalogues d’application dont rien ne justifie les discriminations actuelles avec La Réunion.
Il est urgent d’agir pour la défense de l’égalité des citoyens ultramarins et je ne manque pas d’arguments juridiques pour soutenir toute action en ce sens ».
Il faut remettre ce dossier sur la table pour parler d’une même voix car c’est une situation qui ne pénalise pas seulement La Réunion mais également les autres territoires victimes de cette discrimination géographique.
Il faut espérer que la nouvelle Région portera ce dossier devant les instances européennes avec le soutien des élus Réunionnais."
Si les réclamations aboutissent, les plateformes devront indemniser les personnes lésées mais aussi faire face à des sanctions financières importantes car elles contreviennent droit du marché européen.
"A titre d’exemple, la Commission Européenne a sanctionné la société GUESS à une amende de près de 40 millions d’Euros pour avoir eu recours au géoblocage afin d’empêcher des ventes transfrontalières au sein de l’Union Européenne !" précise Maitre Sulliman Omarjee.
Peut on espérer une telle sanction pour l’Appstore ou Google Play ? Affaire à suivre…