Le droit à mourir fait débat en ce moment à l’Assemblée Nationale, les députés examinent un projet de loi qui pourrait ouvrir la voie à un suicide assisté. Cela représenterait un chamboulement pour les malades, pour leurs familles, mais aussi pour les soignants. Éric, patient en soins palliatifs, témoigne.
Vivre ou ne pas vivre ? Dans l’unité de soins palliatifs de la clinique de Sainte-Clotilde, la question revient souvent. Éric Leroux est un patient arrivé en début d’année, atteint d’un cancer confronté à la douleur et à l’inefficacité des traitements. Il a exprimé la volonté d’en finir.
"Pour moi, il était impossible de me retrouver à long terme bloqué sur un lit et dépendant pour la vie de tous les jours. Être dépendant pour tout ce qui est de s’habiller, manger et toutes les choses intimes".
Pris en charge et accompagné, Éric est finalement revenu sur sa décision. "J’ai une fille et une petite-fille. Je me suis dit qu’elles avaient besoin de moi. Je me dis qu’il y a encore de belles choses à vivre".
Que serait devenu Éric si on l’avait aidé à partir avant qu’il ne change d’avis ? En France, le recours à l’euthanasie ou au suicide assisté reste illégal. À l’avenir cette question vitale pourrait se poser.
Si Éric estime qu’une évolution de la loi serait souhaitable, les soignants interrogés expriment une vive opposition. "Quelle est la différence entre quelqu’un qui tue dans la rue et moi, une soignante qui donne la mort avec l’autorisation de la loi ? Le résultat est le même, je ne suis pas devenue soignante pour tuer", explique Béatrice Auguste, aide-soignante en unité de soins palliatifs.
Ces inquiétudes sont également relayées par la société française d’accompagnement et de soins palliatifs. "Ce projet de loi constitue un point de rupture majeur. Il remet en question dans la loi le devoir fondamental de l’humanité de ne pas provoquer la mort, même à la demande de la personne".
Dans la communauté médicale, d’autres voix considèrent l’aide à mourir comme le geste d’accompagnement ultime. Cette vision est également défendue par l’association pour le droit à mourir dans la dignité.
" On voit bien la souffrance des personnes en fin de vie et on est là à attendre des jours et des jours qu’il meurt. Pourquoi refuser à quelqu’un le choix de sa condition de fin de vie ?", s’interroge Jocelyne Lauret, déléguée régionale de l’association pour le droit à mourir dans la dignité.
En 2022, un comité d’éthique s’est dit favorable à une aide active à mourir strictement encadrée. Selon la profession, seuls 30% des patients éligibles y auraient effectivement accès.