Une nouvelle crise dans le BTP, pourquoi ? Pourquoi le secteur ne va pas bien ? Quel état des lieux des entreprises de la filière ?
Le secteur du BTP vacille, il est au bord du gouffre. C’est une tension supplémentaire dans le quotidien des ouvriers.
"Il n’y a plus de construction. Comment faire pour débloquer les sentiers ? Le financement est là, tout est là" .
Depuis le début d’année, 1 000 salariés du BTP ont perdu leur emploi pour faute de chantier. Comment en arrive-t-on à cette situation ?
Premier coupable : la baisse de la commande publique. En 2023 les appels d’offres ont diminué de 30 %. "On demande de faire à minima 3 000 logements par an, on en fait que 400 cette année. L’an dernier, on en a fait que 1200", affirme un syndicaliste.
En 2023, le nombre de permis de construire a reculé de 11 % et du côté des logements sociaux, il n’y a pas plus de dynamisme.
En 2023 un budget de 70 millions d’euros avait pourtant été voté. "10% utilisé, il y a 5 millions qui ont été utilisés et il reste encore 70 millions dans la corbeille. Au niveau régional c’est pareil. La région nous donne un programme avec le démarrage de travaux en 2025, rien pour 2024".
Toujours du côté des logements sociaux, 6 communes de l’île ont écopé de lourdes pénalités pour ne pas avoir atteint le quota de 20 ou 25 % de logements sociaux imposés par la loi, SRU.
La baisse des demandes de construction des demandes est en grande partie responsable de cette crise. Mais l’augmentation du prix du fret n’est pas innocente dans cette affaire.
En novembre 2023, un conteneur coûtait 1500 dollars. Depuis la crise en mer rouge début 2024, il faut compter 5 000 dollars. Autre coupable dans cette affaire : la hausse du prix des matériaux. L’acier a vu son prix flamber de 120 %. Le prix des tuyaux a été multiplié par 3, des hausses supportées par des entreprises.
Le marché lui ne s’adapte pas. "Pour l’instant, sur les marchés on n’arrive pas à se positionner sur les appels d’offres publics qui sont infructueux parce qu’il dépasse les budgets prévus. Mais les hausses de matériaux sont bien réelles et présentes. Donc les entreprises sont obligées d’aligner leur prix. Ce sont ce genre de choses que l’on subit au quotidien" .
A ces contraintes s’ajoutent des délais de paiement à rallonge qui dépassent parfois 4 mois contre les 30 jours légaux. Conséquence : parmi les entreprises en faillites, 25 % venaient du secteur du BTP. Elles étaient 530.
Des solutions, il y en a. On pourrait penser au fret, l’idée serait d’importer dans sa zone géographique. Mais d’autres solutions plus immédiates ont déjà été mises sur la table par les syndicats. "Il faut un nouveau dispositif incitatif pour le logement, de défiscalisation spécifique dans le nouveau plan logement qui va être mise en place pour La Réunion. Il faut un dispositif spécifique pour l’activité. Pour ce qui concerne tout ce qui est viabilité et protection des entreprises, on préconise l’entrée en secteur de compétitivité renforcée. Ca consiste en une exonération complète pour les chefs d’entreprise. Ca donnera une bouffée d’oxygène", explique Anthony Lebon, président de la Fédération réunionnaise du bâtiment et des travaux publics (FRBTP).
Aujourd’hui, le plan de relance est loin. Face à cette situation, les syndicats demandent un plan d’urgence avec des solutions concrètes.