Aujourd’hui, rencontre avec une jeune Réunionnaise. Camille, âgée de 23 ans, gère élevage porcin au Tévelave. Elle témoigne sur la place de la femme dans ce domaine encore très masculin.
Camille est une jeune Réunionnaise de 23 ans. En 1970, son grand-père s’est installé en élevage porcin en 1970 au Tévelave et est devenu membre de la CPPR (Coopérative des Producteurs de Porcs de la Réunion) en 1974, avec un quota de 12 truies : "Par la suite, mon père a repris l’exploitation et a progressivement augmenté le nombre d’animaux à 32 truies reproductrices. Après l’établissement de nouvelles normes européennes concernant l’agriculture en 2012, il a été dans l’obligation de se délocaliser sur la commune de Saint-Leu plus précisément au lieu dit le Plate et de construire un nouveau bâtiment."
"Le 31 décembre 2024 marque la fin des deux premières années en société avec mes parents. Cet engagement m’a permis de reprendre le flambeau à mon tour. Mon travail repose sur une histoire de transmission de génération en génération. Je prends le relais avec fierté et amour", précise Camille.
Pour la jeune éleveuse, la mission principale de son métier est de nourrir la population. Pour se faire, elle s’engage au quotidien à veiller au bien-être de ses animaux, qu’ils aient une alimentation adaptée, la santé, qu’ils soient dans un environnement conforme à leurs besoins : "Travailler dans l’élevage est ma source de revenus, mais j’ai malgré tout cette notion de bientraitance animale."
"L’élevage porcin est technique, il y a une organisation prédéfinie. Mon élevage est qualifié « naisseur-engraisseur ». Je gère toutes les étapes, la reproduction, ainsi que toutes les phases successives d’engraissement. Je m’occupe de la reproduction par insémination, je m’assure que la gestation se passe bien. Au moment venu, je veille au bon déroulement des naissances, je réalise les premiers soins aux porcelets (ils sont séchés, les cordons ombilicaux désinfectés...). Au bout d’un certain temps, les porcelets sont transférés en post-sevrage puis vers celle des engraissements jusqu’à ce qu’ils aient atteint l’âge et le poids idéal pour sortir de l’exploitation, on les appelle alors des porcs charcutiers. Mes animaux sont élevés avec un cahier des charges strictes, qui permet aux consommateurs d’avoir une traçabilité."
Comme chaque matin, Camille arrive très tôt sur le site, et commence d’abord par l’alimentation, puis se charge du nettoyage : "Ce sont les tâches quotidiennes à réaliser, le reste des actions sont planifiées à l’avance. Cependant, travailler avec du vivant nécessite une capacité d’adaptation. Les tâches peuvent évoluer en fonction des aléas que je peux rencontrer, par exemple, des pannes de matériels, la plomberie, l’électricité, etc. Il faut savoir être polyvalente !"
"En ce qui concerne mon parcours professionnel, j’avais pour première idée de devenir auxiliaire de puériculture ou même ambulancière. J’ai changé d’avis en cours de route et je me suis retournée vers le monde agricole. Je me suis donc rendu au LEGTA de Saint-Paul et j’ai fini par être diplômée d’un BAC STAV (Science et Technologie de l’Agronomie et du Vivant).
J’ai enchaîné avec un BTS production animale en alternance. Mon père m’a embauchée en tant que stagiaire et j’ai pu découvrir son métier. Durant ce contrat, j’ai eu tout le temps de réfléchir à la succession, voir si la finalité de ces études concordait à mes attentes dans la vie. Assez rapidement, j’ai mis les cours de côté pour me concentrer sur la création de la société avec mes parents. Bien que le BAC suffisait pour mon installation, cette période en BTS m’a aidé à mûrir mon projet professionnel."
À seulement 23 ans, Camille mène un élevage porcin quasiment seule et est également administratrice au syndicat des Jeunes Agriculteurs : "J’ai conscience des responsabilités que je porte tous les jours et du métier assez éprouvant que je pratique, c’est les montagnes russes. Face aux difficultés, il faut rester persévérante, c’est une occasion d’apprendre et de grandir. Chaque épreuve m’a façonné et m’a construite. A force, je suis devenue une personne résiliente et j’aspire à être la meilleure version de moi-même."
"Selon moi, la femme devrait être indépendante financièrement, c’est une forme de liberté. Oser se lancer, et se faire confiance. Elle doit pouvoir défendre ses droits et ses convictions avec fermeté. Et peut importe le domaine d’activité. Les mentalités changent, de plus en plus de femmes s’engagent dans des secteurs dit "d’hommes" et je les encourage, nous sommes tout autant capable. Nous devons briser les stéréotypes et les genres associés à certains métiers."
"Aujourd’hui, en prenant du recul, et en regardant tout ce que j’ai accompli, mes attentes ont bien été comblées ! Vivre dans les hauteurs de l’île, dans le calme et la fraîcheur, avec de beaux paysages, se lever à l’aube et s’occuper des animaux, voilà tout ce qui me plaît, particulièrement la paix !"