Chloé, ancienne régisseuse au Bataclan venait de rentrer à La Réunion lors des attentats du 13 novembre 2015. Quatre ans après les faits, elle témoigne de ce moment douloureux qu’elle a vécut par téléphone.
"J’étais régisseuse de concert à l’époque où j’habitais à Paris au Bataclan. Au moment des attentats , on venait de rentrer à La Réunion depuis peu de temps avec mon mari, ça faisait très peu de temps que l’on était rentré et je me souviens bien de ce soir là. Je me souviens, il était très tard à La Réunion avec le décalage horaire, j’ai plusieurs personnes qui ont essayé de me joindre pour voir si j’allais bien, si j’étais pas à la salle, ils ne savaient pas forcément que je venais de rentrer à La Réunion.
Là, j’ai compris qu’il se passait quelque chose. J’ai essayé tout de suite de joindre mes amis, mes collègues. Au Bataclan c’est une salle où j’ai travaillé, où j’ai passé beaucoup beaucoup de temps, dont je connais tous les petits recoins".
"J’ai essayé de joindre en vain mes collègues, mes amis qui étaient dans la salle, qui étaient sur la terrasse. À un moment, une de mes amies m’a appelé, elle était au concert et elle était en train de s’échapper du Bataclan. J’ai essayé de la réconforter comme je pouvais, avec la distance, par téléphone.
J’ai ce souvenir très clair, j’étais dans mon salon, j’avais la télé en fond avec les infos qui tournaient, ma copine au téléphone, mon mari qui était à l’étage dans la chambre, et moi en train d’essayer de comprendre ce qui se passait. Dès qu’aux infos ils expliquaient ils sont à tel endroit, il est en train de se passer ça, je connais cette salle par coeur, donc je visualisais exactement quand ils disaient ils sont dans la loge, ils sont à l’étage, ils sont là ; je visualisais chaque endroit, chaque moment, je savais où ils étaient. D’avoir mon amie au téléphone, c’était très dur. Elle m’expliquait qui elle avait vu que l’on connaissait, qui avait pu s’en sortir, qui n’avait pas pu s’en sortir".
"J’ai des amis qui étaient aussi en terrasse ce soir là, qui ont été sous les balles, qui ont été victimes des attentats et sur la terrasse, une de mes amies très très chères qui elle s’en est sortie. Elle est venue quelques temps après à La Réunion pour se ressourcer un peu, pour s’éloigner de Paris, parce que c’était trop dur de rester là-bas. Elle avait besoin de souffler donc elle est venue à la maison à La Réunion".
"Je me souviens, le lendemain ou deux jours après, il y avait un concert à la Ravine Saint-Leu, où j’étais parce que j’avais des collègues, des musiciens de Paris qui étaient là. On était sous le choc et on se disait, c’est pas possible. Nous qui travaillons dans la musique on se disait, c’est pas possible que quelque chose comme ça arrive dans la salle où l’on a l’habitude de travailler, d’aller".
"Aujourd’hui, des années après, il ne faut pas oublier et surtout, il ne faut pas qu’on se laisse avoir par la peur, parce que la musique c’est important. Continuer de faire rêver les gens, c’est important. C’est le message qu’on voudrait faire passer, c’est qu’ on n’oublie pas ce moment, il faut qu’on continue de jouer de la musique, d’être ensemble, de se rassembler, de vivre c’est moment là tous ensemble".