Au sein de l’association ARPEDA, Jean Jacques Guerrini professeur, enseigne la langue des signes aux adultes. Comment se fait une communication basée sur la gestuelle en ces temps de crise ?
L’association Réunionnaise de Parents d’Enfants Déficients Auditifs (ARPEDA) s’est structurée sur le projet d’intégration des jeunes et des adultes sourds en milieu ordinaire. L’objectif de la structure est d’informer, de former, de rassembler et de représenter les parents d’enfants déficients auditifs. Jean Jacques Guerini, le professeur étant lui même sourd, la formation est un échange non verbale. Responsable de la session d’enseignement, il nous emmène dans le monde du langage non verbal, entre partage et adaptation.
Il n’existe pas un mais plusieurs langages des signes, en fonction des cultures et des pays. La langue des signes française (LSF) ne s’apprend ainsi pas comme l’alphabet, il est "signé", imagé. En langue des signes, le coronavirus est représenté par "une boule avec des piquants".
Pour les personnes concernées, c’est une lutte quotidienne. Si l’explosion d’internet a pu permettre à la communauté de se rassembler, elle pose également des problèmes lorsqu’il s’agit par exemple de prendre rendez-vous ou encore de régler ses impôts. S’il est difficile de savoir combien de personnes sont concernées, le professeur estime qu’une personne sur 1000 serait sourde profond, malentendant ou en difficulté auditive. À La Réunion, le nombre de formateur ne semble pas suffisant.
Monsieur Guerrini pointe également du doigt le manque de communication de la part des institutions ou autres structures touristiques. Les structures d’accueil touristiques sont encore trop peu nombreuses à inclure les sourds et malentendants, et le personnel rarement formé.
Durant la période de confinement, la continuité pédagogique a été très difficile. Si certaines allocutions sont signés, elles sont rarement comprises dans leur entièreté par la communauté. Selon Jacques Guerrini, seulement 50% à 60% des doublages ont été compris. "Il s’agit d’un vocabulaire complexe et concernant la santé" explique Jean Jacques Guerini. Durant cette période, il a été sollicité pour retraduire, réexpliqué les propos des ministres ou du président de La République. Par ailleurs, ils restent parfois oubliés lors des grandes allocutions qui concernent pourtant toute la population "La ministre des Outre-mer est venue à La Réunion.Elle a parlé, elle a parlé pendant une heure, elle est parti, est nous ? Où sont les interprètes ? Ça ne va pas, on en a besoin nous", regrette Jacques Guerrini.