René-Paul VICTORIA a remis, hier, au Premier Ministre, le rapport qu’il lui avait demandé relatif à la mise en oeuvre du revenu de solidarité active (RSA) et du contrat unique d’insertion (CUI) dans les départements d’outre mer et les collectivités de Saint Pierre et Miquelon, Saint Martin et Saint Barthélémy. Fruits des entretiens menés avec l’ensemble des acteurs concernés de chaque collectivité, L’ancien Maire de Saint-Denis a fait 21 propositions .
Ces propositions tiennent compte, bien évidemment, de la création du revenu supplémentaire temporaire d’activité (RSTA), qui est une anticipation du RSA. Le RSTA sera versé par l’État en juillet prochain, avec effet au 1er mars. Il prendra fin lorsque le RSA sera mis en œuvre.
LES PRINCIPALES PROPOSITIONS :
1-Mettre en place un dispositif d’évaluation du RSTA afin de faire le bilan de cette prestation dès mi 2010.
Le RSTA est conçu comme une anticipation du RSA : c’est une prestation qui a certains points communs avec le RSA (publics ayant un faible niveau de revenu, mesure d’intéressement pour les personnes en emploi ou reprenant un emploi) mais aussi de fortes différences (le RSA prend en compte la composition de la famille alors que le RSTA ne la prend pas en compte, le RSTA est forfaitaire alors que le RSA est dégressif, le RSTA concerne les jeunes alors que le RSA est attribué normalement à compter de 25 ans, comme le RMI). Enfin, le RSTA est un système qui n’est pas sans intérêt, notamment en raison de sa simplicité. Il n’est donc pas possible de décider, sans y voir plus clair au préalable, comment articuler le RSA et le RSTA.
C’est pourquoi, il faut laisser le RSTA fonctionner pendant une période suffisante, avant de mettre en oeuvre le RSA, et ce afin de pouvoir comparer les deux dispositifs, et de retenir les caractéristiques les plus intéressantes de l’un et de l’autre. Je propose donc une évaluation comparée du RSA et du RSTA. L’objectif est de pouvoir étudier, pendant cette période intermédiaire, les effets du RSTA et ceux du RSA pour savoir laquelle est la plus adaptée aux situations ultramarines. Ce n’est qu’une fois cette évaluation faite qu’il sera possible de décider soit de la mise en place du RSA, soit de la poursuite du RSTA, soit de la mise en oeuvre d’une prestation combinant les caractéristiques du RSA et du RSTA. L’essentiel étant que l’Outre-mer bénéficie du meilleur dispositif : du plus juste et du plus efficace.
2- Créer une aide au logement des jeunes travailleurs et renforcer le rôle des conseils
généraux dans les politiques d’insertion.
Le chômage touche dans les DOM près de la moitié des jeunes actifs (15-24 ans) contre 20% au niveau national. L’insertion rapide dès l’entrée sur le marché du travail est déterminante pour la suite du parcours des jeunes.
Dans les DOM, cette insertion est souvent freinée par les distances et les problèmes de logement. Il est donc indispensable de faciliter le logement des jeunes travailleurs. Je propose d’utiliser le 1% logement afin de diminuer le loyer restant à charge, après application des allocations logements. A l’heure actuelle, chaque organisme collecteur du 1% logement a l’obligation de consacrer 9% des fonds collectés aux logements des personnes en
difficulté d’insertion. Une partie de ces sommes, abondées éventuellement par l’État, pourrait être utilisée pour faciliter le logement des jeunes travailleurs. Par ailleurs, je propose de redynamiser les politiques d’insertion, en confiant l’élaboration du Plan départemental d’insertion au Conseil Général. En conséquence, je propose également de donner la possibilité aux départements soit de conserver les agences départementales d’insertion (ADI) soit de les intégrer à la collectivité .
3- Mettre en oeuvre le contrat unique d’insertion dés le 1er janvier 2010, sans désengagement financier de l’État.
L’architecture des contrats aidés est complexe en outre-mer. Je propose de la simplifier et de mettre en oeuvre le contrat unique d’insertion outre-mer, dès le 1er janvier 2010, comme en métropole : il n’y aurait donc plus qu’un contrat aidé, plus souple et plus adaptable, décliné en un volet marchand et en un volet non marchand. Pour tenir compte des contraintes financières des collectivités ultramarines, je préconise des clefs de financement du CUI adaptées à l’outre-mer, notamment avec un engagement financier plus fort de l’État.
4- Décaler à 55 ans l’âge d’entrée dans le RSO ( Revenu de Solidarité).
Il me semble préférable de maintenir le RSO mais d’en décaler, par paliers, l’âge d’entrée à 55 ans pour les nouveaux entrants. Le revenu de solidarité n’existe qu’en outre-mer. Il est ouvert à partir de 50 ans, et sa logique est très différente de celle du RSA comme du RSTA, puisque la personne en bénéficiant s’engage à ne pas reprendre un emploi. Cette mesure a connu un succès non négligeable, mais elle contribue à sortir trop tôt du marché du travail des personnes qui pourraient contribuer à l’activité de leur territoire.
5- Supprimer l’allocation pour le retour à l’activité (ARA), qui fait double emploi avec les mesures d’intéressement de droit commun.
Cette suppression ne mettrait, bien sûr, pas en cause les droits acquis des personnes qui sont
déjà allocataires de l’ARA. Créée en 2000, l’ARA a été maintenue en 2006, alors même que d’autres mesures d’intéressement à la reprise d’activité étaient mises en oeuvre dans les DOM.
Elle n’a pas connu un grand succès et est presque abandonnée dans certains DOM. La suppression de l’ARA me paraît donc possible . Elle simplifierait considérablement le choix des bénéficiaires du RMI .
LES PROPOSITIONS QUI PEUVENT ÊTRE MISES EN OEUVRE LORSQUE LE RSA SE SUBSTITUERA AU RSTA , NOTAMMENT SI CETTE SUBSTITUTION DEVAIT INTERVENIR À BRÈVE ÉCHÉANCE .
6- Prévoir une prime spécifique d’intéressement pour les personnes reprenant un emploi à temps plein dans les DOM
L’abandon des mesures d’intéressement à la reprise d’un emploi de la loi de 2006 découlera automatiquement de la mise en oeuvre du RSA. Cela peut, dans des départements où l’économie informelle est une réalité, inciter à des stratégies d’utilisation du RSA consistant à ne déclarer qu’une partie de son activité. Pour éviter ce phénomène, je propose de créer une prime spécifique aux DOM, forfaitaire, pour les personnes reprenant un emploi à temps plein.
7- Prévoir un RSA chapeau pour les jeunes salariés de 22 à 25 ans.
Le moment de l’entrée dans la vie active constitue une étape essentielle pour l’insertion professionnelle des jeunes. Je propose d’apporter un soutien spécifique aux jeunes dans la tranche d’âge des 22-25 ans, couverte actuellement par le RSTA, mais qui n’auront pas droit au RSA tel qu’il est mis en oeuvre en métropole. Je préconise d’ouvrir le bénéfice d’un RSA chapeau à tous les jeunes salariés de 22 à 25 ans .
8- Adopter pour le RSA en outre-mer les mêmes paramètres qu’en métropole et prévoir un fonds d’accompagnement du transfert de l’API aux Départements.
Pour le calcul du RSA, je préconise d’appliquer les même paramètres qu’en métropole (c’est à-dire un taux de cumul de 62% entre revenus d’activité et RSA) . En effet, cela me semble un bon compromis entre lutte contre la pauvreté (un taux de cumul trop faible ne permettrait pas de lutter efficacement contre la pauvreté au travail) et respect des relations employeur-salarié (un taux de cumul trop élevé substituerait trop largement les Collectivités publiques aux employeurs).
En ce qui concerne le transfert de l’API aux Départements, je propose de créer un fonds spécifique d’accompagnement, compte tenu des caractéristiques démographiques particulières des DOM.
Le mot de René-Paul Victoria :
« Au terme de la mission qui m’a été confiée, j’ai remis au Premier ministre vingt et une propositions de mise en oeuvre du revenu de solidarité active (RSA) et du contrat unique d’insertion (CUI) dans les départements d’outre mer et les collectivités de Saint Pierre et Miquelon, Saint Martin et Saint Barthélémy
Ces propositions sont le fruit des entretiens que j’ai menés avec l’ensemble des acteurs concernés. Ces 21 propositions ont pour objet d’adapter à l’outre-mer le revenu de solidarité active et le contrat unique d’insertion. Afin de lutter efficacement contre la pauvreté et l’inactivité, il faut que les prestations tiennent compte au mieux des caractéristiques et des besoins de chaque territoire. Cela impose d’évaluer les prestations et les organisations qui existent à l’heure actuelle, et d’imaginer une politique d’insertion qui réponde aux besoins identifiés. Ces propositions tiennent compte également de la création du revenu supplémentaire temporaire d’activité (RSTA), qui est une anticipation du RSA. Le RSTA sera versé par l’État en juillet prochain, avec effet au 1er mars. Il prendra fin lorsque le RSA sera mis en oeuvre. Dans ce contexte, j’ai formulé deux séries de propositions : celles qui peuvent être mises en œuvre sans délai, et celles qui pourraient être applicables lorsque le RSA sera mis en oeuvre.