Elie Hoarau était l’invité de l’émission Face à l’Info. Le secrétaire général du Parti Communiste Réunionnais s’est exprimé sur les tensions qui existeraient au sein de la Majorité du Conseil Général. Concernant la problématique des carburants, l’élu a préconisé le versement immédiat d’une prime de 200 euros aux ménages les plus pauvres. Enfin, Elie Hoarau est revenu sur les tensions qui agitent actuellement le Parti Communiste Réunionnais. Le ténor du PCR a confirmé le divorce entre Huguette Bello et le parti.
La semaine a été marquée par des scènes d’émeutes et de pillages. Est-ce des actes que vous condamnez ?
Elie Hoarau : Comment s’étonner de ce qu’il se passe quand on sait que la Réunion est le département de France et d’Outre-Mer le plus gravement touché par la situation sociale ? Plus de 120 000 chômeurs, 60% des jeunes diplômés sans travail. A l’époque, on appelait la Réunion l’île de la tortue. Mais ça ne veut pas dire que les Réunionnais ont du sang de tortue. Je pense que face à cette situation, face aux injustices, il fallait s’attendre à ce qu’il y ait cette révolte. Et je crois qu’il faut apporter rapidement une solution pour désamorcer ce qu’il se passe actuellement.
Dans ce contexte, le Parti Communiste Réunionnais demande à l’Etat de verser une prime de 200 euros aux plus pauvres. Cela concerne combien de foyers et ces foyers perçoivent combien par mois ?
Elie Hoarau : C’est à définir.
Donc, vous proposez une solution sans l’étudier ?
Elie Hoarau : Non, ça ne va pas coûter des millions d’euros à l’Etat français. Lorsqu’il y a eu des événements analogues en Guadeloupe, l’Etat a tout de suite désamorcé le mouvement en accordant aux plus pauvres une prime.
Une prime durant quatre mois. Et après ? Que feront ces ménages ?
Elie Hoarau : Quatre mois pour permettre aux acteurs, que ce soit aux politiques, que ce soit aux intéressés, de discuter de la situation, et aussi permettre au Gouvernement de trouver une solution plus pérenne.
Depuis combien de temps faites-vous de la politique ? Depuis de nombreuses années, on a vu la Droite et la Gauche se succéder et toujours pas de réponse concrète au problème de la cherté de la vie. Pensez-vous qu’en quatre mois, raisonnablement, on pourra arriver à une solution ?
Elie Hoarau : Je fais de la politique depuis un certain temps. Quatre mois c’est le temps de la discussion. C’est le temps de ne pas se précipiter, dans n’importe quelle situation et d’établir ensemble un véritable dialogue. Je pense que c’est possible en quatre mois.
Voyons quelles sont les solutions que préconisent notamment les présidents de collectivités. Le Président de la Région évoquait cette semaine la possibilité de concurrencer la SRPP avec la création d’une unité de stockage. Qu’en pensez-vous ?
Elie Hoarau : Il faut aller plus loin. Quand on parle de monopole, il faut aller plus loin. Il faut notamment savoir comment sont constituées les primes à la source, quand on achète les carburants à Singapour. Comment se fait-il, par exemple, que nous payons 30% plus cher que les Mauriciens. Il y a là la nécessité de faire la transparence. Après, évidemment, il faut combattre les monopoles.
Cette question, Paul Vergès ne se l’est pas posé lorsqu’il était à la tête de la pyramide inversée ?
Elie Hoarau : Oui, absolument. Mais cela ne dépend pas de la Région mais de l’Etat. L’Etat qui met en place le cahier des charges pour l’achat. Je pense qu’il n’est pas nécessaire d’attendre quatre mois pour trouver la solution et pour faire contribuer les pétroliers.
On ne peut pas seulement demander aux collectivités locales de payer. Il faut que les pétroliers qui font des bénéfices colossaux participent. Total a réalisé plus de dix milliards de bénéfices l’an dernier.
Est-ce que cette unité de stockage comme le préconise Didier Robert est une solution ?
Elie Hoarau : C’est une partie de la solution mais ce n’est pas la solution. La solution, c’est d’aller vers les pétroliers, connaître les prix à la source et faire contribuer les pétroliers.
La baisse du prix des carburants, la baisse des prix des produits de première nécessité... on a les sentiment que c’est possible quand on écoute les politiques alors, pourquoi avoir attendu finalement qu’on arrive à la situation actuelle ?
Elie Hoarau : Je pense qu’il est essentiel que le Gouvernement prenne les responsabilités et prenne cette affaire en mains. Les prix, les revenus relèvent du Gouvernement. Alors, il faut que le Gouvernement, une fois pour toutes prenne une décision, concernant les prix et les revenus.
Que pensez-vous de la surémunération des fonctionnaires ?
Elie Hoarau : Là aussi c’est de la responsabilité du Gouvernement. Je pense qu’il faut considérer le problème globalement. D’une part, vous avez les minima sociaux, fixés par le Gouvernement au plus bas. D’autre part, vous avez les fonctionnaires qui sont surémunérés. Il faut poser le problème de l’harmonisation des revenus. Nous le posons depuis longtemps. Et je regrette de constater que tous les gouvernements, que ce soit de Droite ou de Gauche, ont toujours éludé cette question. Mais ça crée un sentiment d’injustice. Ce chantier doit être ouvert par le prochain Président de la République.
Au Conseil Général, le PCR a boycotté la commission permanente du Conseil Général. Est-ce une attitude responsable dans le contexte actuel ?
Elie Hoarau : je crois qu’il faut que les règles de fonctionnement au Conseil Général soient respectées. La Majorité est composée de trois formations : les socialistes, le groupe de Nassimah Dindar et nous-mêmes. Il faut qu’il y ait un partage. La bonne gouvernance, c’est le partage des responsabilités et je constate que ce sont ces règles qui n’ont pas été respectées. Les deux autres groupes majoritaires, c’est-à-dire qui font partie de la Majorité, c’est-a-dire les socialistes et nous, ont protesté co,ntre le fait que ces règles ne fonctionnent pas correctement.
La majorité est-elle menacée ?
Elie Hoarau : Tout dépend de l’attitude de la Présidente.
On sent que le PCR et le Parti Socialiste qui n’ont pas siégé d’un commun accord cette semaine, se rapprochent en période pré-législatives. Est-ce qu’un pacte d’union de la Gauche est envisageable dès le premier tour ?
Elie Hoarau : Tout dépendra des discussions que l’on peut avoir. Je crois que chacun peut partir sous son drapeau dès le premier tour et puis on verra ce qu’on fera, comme aux élections cantonales. Cela est possible mais il faut d’abord que la discussion s’instaure. Pour l’instant, elle n’est pas rompue. Mais sur ce sujet très précis, il n’y a pas encore eu de discussions entre nos formations respectives.
Avec ce boycott, le PS et le PCR ont-il voulu faire payer à Nassimah Dindar sa candidature dans la 1ère circonscription ?
Elie Hoarau : Non, il ne s’agit pas de cela. Il s’agit tout simplement du respect des règles de fonctionnement, qui ont été mises en place au moment de la constitution de la Majorité actuelle.
Dans la 2ème circonscription, vous présentez Jean Yves Langenier, Maire du Port et Roland Robert, Maire de la Possession : un duo 100% masculin… que faites-vous de la parité ?
Elie Hoarau : la parité ne s’exerce pas seulement à un scrutin.
Pourtant, vous aviez une femme dans cette circonscription.
Elie Hoarau : Mais on propose également une femme dans une autre circonscription. les listes ne ssont pas encore déposées. Attendez. Je crois pouvoir dire que le problème de la parité, c’est un problème qui nous tient à coeur. Mais cela s’exerce sur tous les mandats. Pas seulement, sur une élection.
Au nom de la discipline et de la parole donnée, vous avez souhaité écarter Yolande pausé de son fauteuil de Maire. Aujourd’hui, on peut dire que c’est Huguette Bello que vous souhaitez pousser contre son gré dans la 7ème circonscription. Quelles considérations porte le PCR aux femmes qui le composent ?
Elie Hoarau : Quand nous demandons à Yolande Pausé de respecter la parole donnée, c’est un honneur que l’on fait aux femmes. ce n’est pas une violence. Concernant Huguette Bello, je suis au regret de dire que cela fait déjà plusieurs années qu’elle s’oppose systématiquement aux décisions du PCR. Elle est sortante dans la circonscription qu’on lui propose. Elle est députée de l’ensemble de la commune de Saint-Paul. Saint-Paul est coupée en deux. Une partie vers le Port, une partie vers Saint-Louis. Donc quand on lui dit "on te propose d’aller dans la 7ème circonscription Saint-Paul/Saint-Louis", elle est également sortante.
Visiblement, vous n’avez pas la même lecture des législatives ?
Elie Hoarau : Moi, j’ai la lecture que tout le monde a. Elle est sortante, aussi bien dans la 2ème que dans la 7ème. En plus, on lui dit qu’elle a toutes les chances de gagner dans cette circonscription. Elle est notre candidate la mieux placée pour remporter, pour gagner. On lui a demandé de porter le drapeau. Elle ne veut pas, elle s’y oppose. Ce n’est pas la première fois.
Huguette Bello fait-elle toujours partie du Parti Communiste Réunionnais ?
Eie Hoarau : Assurément non. Mais ce n’est pas la première fois qu’elle s’oppose aux décisions du parti. Elle a dit qu’aux élections sénatoriales, elle n’avait pas appelé à voter pour Paul Vergès. Aux élections cantonales, quand on a dit qu’il fallait renforcer la Majorité sortante, avec les socialistes, nous-mêmes et le groupe de Nassimah Dindar, elle a dit "c’est une Majorité que je combats" et dans cette Majorité, les vice-présidents étaient Roland Robert et jean-Yves Langenier. Elle se met donc en dehors. Nous prenons acte.
Qui sera le candidat du PCR dans la 7ème circonscription ? Vous pensez à Claude Hoarau ?
Elie Hoarau : Nous le dirons la semaine prochaine. Il y a beaucoup de candidats possibles.
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