L’ouverture de la route des Tamarins a perturbé les ambitions de Pierrefonds, qui se bat pour conserver sa stature internationale en dépit des impératifs financiers. De quoi nourrir un fort ressentiment des élus sudistes. Attention : terrain miné !
Le contraste est saisissant. Dans le Nord, l’aéroport Roland Garros vient d’engager un ambitieux programme d’investissement de 150 M€. Sa nouvelle aérogare bioclimatique, attendue mi-2023 portera ses capacités de traitement à 3,2 millions de passagers par an contre 2,5 millions actuellement.
Les perspectives sont loin d’être aussi florissantes dans le Sud, où l’aéroport de Pierrefonds, ouvert en 1998, lutte pour sa survie. Ses difficultés remontent à l’ouverture de la route des Tamarins, qui permet depuis 2009 de relier le Sud au Nord en moins d’une heure. Après une décennie de croissance, l’impact a été radical pour la plateforme, désormais en concurrence frontale avec Gillot. Son principal client, Air Austral, a préféré regrouper ses vols dans le plus gros des deux aéroports. La navette Nord-Sud a disparu. Les fréquences vers Maurice ont été réduites au minimum.
En 2008, à son apogée, Pierrefonds accueillait 128 000 passagers par an. En 2014, elle n’en comptait plus que 72 000. Vu de Paris, plusieurs voix plaident pour que Pierrefonds renonce à l’aviation commerciale et se spécialise dans l’aviation de loisirs ou dans le fret agricole, par mesure d’économie.
C’était sans compter sur la détermination des élus du Sud, André Thien Ah Koon et Michel Fontaine en tête, qui n’entendent pas se contenter des seconds rôles. En 2014, un plan de relance a été mis en place, pour booster la fréquentation. Mais l’effet a été de courte durée. Entre 2017 et 2019, le trafic s’est remis à stagner autour de la barre des 100 000 passagers... loin des 250 000 nécessaire pour équilibrer les comptes.
Fin 2019, avant que la crise sanitaire, réduise ses efforts à néant, le gestionnaire de la plateforme misait sur un partenariat prometteur avec Air Mauritius et espérait faire venir des compagnies long courrier. Mais de telles ambitions coûtent cher. Pour rester attractifs, il faut investir sans cesse dans l’infrastructure. Donc solliciter le soutien de la Région, incontournable pour déclencher des financements régionaux, étatiques ou européens.
Longtemps, les élus sudistes ont reproché à Didier Robert de ne pas tenir ses engagements vis-à-vis de la plateforme, en lui imputant notamment le désengagement d’Air Austral. Le climat de guerre froide, qui régnait depuis 2017, entre les barons de la droite n’a sans doute pas contribué à apaiser les relations. Mais l’Union de la droite est désormais reformée. Et certains candidats prennent la défense de Pierrefonds. De quoi changer la donne ?
- Guillaume KEMPF
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