Hier au tribunal de Police de Saint-Pierre, Y.Ghanty comparaissait devant la cour pour avoir fait travailler ses employés le dimanche et ouvert ses établissements au public malgré une décision administrative de fermeture hebdomadaire.
Le travail le dimanche est un grand débat à La Réunion. Régi par la loi d’octobre 1966, uniquement les magasins alimentaires et de première nécessités peuvent ouvrir le dimanche à La Réunion. Pourtant, de nombreux magasins aux activités diverses ouvrent quand même. Ce mardi 24 octobre, au tribunal de Police, Y. Ghanty comparaissait à ce sujet. Patron de plusieurs enseignes de prêt-à-porter, il était notamment jugé sur les enseignes Undiz, Okaidi, Jules et Tally Weij.
En effet, épinglé par la Direction de l’Économie, de l’Emploi, du Travail et des Solidarités en 2021, dans le cadre d’une campagne de lutte contre l’emploi illégal des salariés le dimanche, il lui est reproché de ne pas avoir “respecté le code du travail".
“C’est un privilège”
Le président du tribunal a rappelé à l’accusé que “ne pas travailler le dimanche est un privilège accordé aux salariés depuis des lustres". De plus, il a souligné que "des magasins se sont plaints d’un écart de concurrence ", tout en rappelant que le travail le dimanche “est un débat qui doit être mené à La Réunion ".
Pour se défendre, Y. Ghanthy a tenu à expliquer que "les centre commerciaux de La Réunion imposent aux commerçants d’ouvrir le dimanche matin, c’est dans le bail et le règlement intérieur", déplore le patron. Selon lui, " le groupe Ghanty est opposé au travail le dimanche depuis 30 ans" , mais “si on n’ouvre pas, on paie des pénalités au centre commercial”déplore-t-il. Il poursuit en déclarant que "ce n’est pas un choix de l’entreprise " , car les employés étant payés le triple, "c’est économiquement aberrant" . Pour résumer, le patron du groupe Ghanty reproche aux centres commerciaux de pratiquer des “pressions" aux commerçants pour ouvrir le dimanche.
Un système à repenser ?
Pour l’avocat du prévenu, "les salariés qui travaillent le dimanche sont volontaires" pour la plupart. Et selon ce dernier, "il y a des imperfections à tous les étages, des couches de contraintes et un système qui doit être repensé" . En effet, selon lui, "il y a un jeu entre les magasins concurrents de qui se fait attraper le premier" . Pour l’avocat, il s’agit d’une “application bête et méchante du texte" , de 1966. Et, dans un "contexte économique critique", le travail le dimanche, "c’est de l’activité et de l’emploi" .
Distorsion de concurrence
Pourtant, l’inspecteur du travail interrogé pendant l’audience a rappelé que malgré son passage, "les magasins ont continué à travailler le dimanche". Pour le procureur de la République, "le débat autour du travail dominical à La Réunion est un débat fort intéressant" . Et selon lui, "il aurait fallu convoquer des salariés" pour se constituer partie civile, afin d’élever le débat. Selon lui, "les écarts de concurrence s’entendent" , puisque les magasins des centre villes, eux, "sont totalement fermés le dimanche" . Il a rappelé que le groupe Ghanty avait une quinzaine d’enseignes, dont "un monopole sur certains" . Et ainsi, ils étaient assez influents pour répondre aux pressions des centres commerciaux.
“Quand il y a sanction, il y a réflexion”
Pour conclure, le procureur a rappelé que "la législation n’a pas changé depuis 1966" . Mais ce qui a changé, "c’est que les sanctions sont tombées". Et "quand il y a sanction, il y a réflexion et concertation". Ce dernier a ainsi requis que le patron paye les amendes distribuées par l’inspection du travail, ce qui équivaut à 300 euros pour travail dominical et 150 euros pour l’arrêté administratif, multiplié par le nombre de salariés et le nombre de jours d’infractions.