Jean-Hugues Ratenon était jugé ce mardi 28 janvier 2025 pour avoir refusé de se soumettre à un test d’alcoolémie après avoir causé un accident sur la quatre voies de Sainte-Suzanne en août dernier.
« Ces scènes n’ont jamais existé », affirme Jean-Hugues Ratenon. Les scènes en question ont été décrites par le gendarme chargé de contrôler son alcoolémie, le 24 août 2024. Ce soir-là, peu après minuit, le député de la 5ème circonscription est arrêté sur la voie de droite de la RN2, entre Saint-André et Saint-Denis. Ses feux sont éteints et une jeune conductrice le percute. Après l’impact, elle sort de son véhicule et porte secours à Jean-Hugues Ratenon, endormi dans le véhicule. Il est ensuite amené au CHU de Bellepierre par les pompiers. Il en sortira rapidement sans avoir effectué de prise de sang et autre contrôle de son taux d’alcoolémie. L’autre conductrice est négative à l’alcool et aux stupéfiants.
Le député insoumis était jugé ce 28 janvier au tribunal de Champ Fleuri lors d’une audience de juge unique pour “conduite en état d’ivresse manifeste, défaut de maîtrise du véhicule et refus de se soumettre aux tests d’alcoolémie et de stupéfiants”. L’homme politique se défend d’avoir bu ce soir-là. “J’ai fait un malaise vagal, causé par un état de fatigue et l’angoisse”. Il affirme ne pas se souvenir de l’accident et avoir repris ses esprits à l’hôpital. “À ce moment-là, je ne sais pas que j’ai fait un malaise, que j’ai eu un accident”, explique-t-il. Selon lui, la médecin du CHU lui a bien proposé une prise de sang, sans lui préciser que c’était dans un but de contrôle d’alcoolémie. Il explique qu’il a préféré rentrer chez lui.
"Moi je ne me soumets à rien"
“Je n’ai pas eu d’interaction avec les gendarmes”, assure le député. Une version démentie par le gendarme de permanence ce soir-là, chargé d’aller à l’hôpital afin de soumettre le député aux tests d’alcoolémie et de stupéfiants. Fait rare lors de ce type d’audience, le militaire est présent pour témoigner. “Je le suis me suis présenté et je lui ai expliqué que c’était un contrôle tout à fait normal. Il a refusé. Je lui ai proposé un éthylotest s’il avait peur des piqûres, il a aussi refusé. Je lui ai indiqué qu’il s’exposait à des poursuites s’il refusait. Le médecin préconisait un scanner, il n’a pas voulu le faire non plus”, retrace le gendarme. “Il m’a répondu, “moi, je ne me soumets à rien”” Le militaire témoigne avoir prévenu Jean-Hugues Ratenon, une deuxième fois, des poursuites auxquels son refus l’exposait, sur le parvis du CHU, alors qu’il partait. “Il a dit que nous, gendarme, n’étiez jamais présents pour protéger les honnêtes citoyens.”
Selon le militaire, l’homme politique était alcoolisé ce soir-là. “Je sais reconnaître une personne alcoolisée quand j’en vois une devant moi”. “Il n’y a qu’une personne qui a senti l’alcool, c’est vous”, lui répond Me Erick Hesler, avocat de la défense. En effet, l’autre conductrice et son passager n’ont pas noté d’odeur d’alcool. “Pourquoi n’a-t-on pas cité les médecins à la barre ?” insite, Me Jade Dousselin, le deuxième conseil du député et avocate parisienne de Jean-Luc Mélenchon. “Il a le droit de faire un refus de soin”, explique-t-elle en accusant la justice de vouloir faire du député “un exemple”. Les robes noires plaident la relaxe.
Un simple refus de soin pour la défense
Me Fabian Gorce, avocat de la partie civile, explique que celle-ci n’a pas porté plainte dans un premier temps car “elle avait peur des représailles”. Elle a été victime de douleurs après l’accident et s’est vu prescrire 5 jours d’ITT. La jeune femme demande une somme de 1500 euros, le coût de sa voiture, au titre de son préjudice matériel et 10 000 euros au titre de son préjudice moral.
La procureure, Véronique Denizot, dénonce des “propos tenus assez désagréables” lors d’une conférence de presse donnée après l’accident par le député. Il y avait porté des accusations de "cabale politique” venue des “francs-maçons”. Elle rappelle également que casier judiciaire du député compte une première condamnation pour conduite en état d’ivresse, remontant à 1998. La procureure de Saint-Denis requiert six mois de prison avec sursis, 2 000 euros d’amende, une suspension judiciaire du permis de conduire de 9 mois et une contravention de 300 euros. Le délibéré sera prononcé le 13 février prochain.
Philippine Kauffmann