Dès son arrivée au tribunal de Saint-Pierre cet après-midi, le docteur Lucas, médecin généraliste, a été accueilli par un groupe de sympathisants rassemblés devant les grilles, arborant une banderole portant un message d’encouragement. Après les premières réquisitions formulées à son encontre, le jugement officiel sera rendu le 29 juin 2023.
Rappel des faits
Les faits remontent à 2021, en plein cœur de la crise de la Covid-19, lorsque le docteur Lucas aurait établi de faux documents sanitaires en délivrant de faux passeports sanitaires au sein de son cabinet médical. Mais aussi, il aurait fait l’usage d’un faux pass sanitaire pour pouvoir exercer sa profession et aurait escroqué la Sécurité Sociale de la Réunion et l’ARS.
Cet après-midi, il s’est présenté à la barre dans une salle d’audience comble. Les premières réquisitions sont tombées : 6 mois de prison avec sursis simple, assortis d’une amende de 10 000 €, dont 5 000 € avec sursis, à l’encontre des pouvoirs publics. S’ajoute à cela une demande de peine complémentaire : l’interdiction définitive d’exercer sa profession.
Déroulement de l’audience :
Des manifestants rassemblés devant les grilles, une salle comble et des personnes vêtues de blanc. Voilà l’atmosphère qui régnait cet après-midi au tribunal de Saint-Pierre. Lorsque le parquet a interrogé le prévenu sur les motifs de ses actes, il a répondu : "Je voulais m’en sortir, pouvoir payer ma maison, sauver mon travail et ma femme."
Le médecin a également expliqué comment il délivrait ces faux passeports sanitaires sans se faire prendre. Il s’était enregistré auprès de l’ARS en tant que médecin certifié et apte à vacciner. "Il me semblait inconcevable de demander à mes patients de se faire vacciner pour obtenir un passeport vaccinal, alors que moi-même j’avais un faux passeport", a-t-il avoué.
"C’est un réel débat scientifique. Il a cherché à tromper non seulement ses patients, mais aussi notre système de santé", affirme le procureur. Elle soulève également la question de son aptitude à exercer à nouveau, en soulignant que sa déontologie doit être irréprochable, avec une relation de confiance envers des organismes tels que l’ARS, l’Ordre des Médecins et la CGSS de La Réunion. Elle demande une interdiction définitive d’exercer à son encontre.
L’avocate des parties civiles : L’ARS, L’Orde des Médecins de la Réunion et de la CGSS, Maitre Chane Meng Hime, estime que le comportement du Docteur Lucas n’a pas contribué à la lutte contre l’épidémie. Aussi, elle ajoute qu’il a profité de cet effet d’aubaine pour facturer la Sécurité Sociale de la Réunion le maximum pour avoir le plus de subventions possibles. Par ailleurs, des incohérences sont à exposer puisque des vaccins dédiés aux séniors étaient "faussement injectés" aux mineurs, ce qui a interpellé la CGSS de la Réunion.
La défense a soulevé plusieurs éléments :
Son avocate, Maître Clémence Godinaud, expose trois faits qui ont conduit son client à commettre ces infractions : l’évolution imprévisible du virus, l’obligation de vaccination et la rapidité de mise sur le marché des vaccins. "Comment pouvait-on garantir leur efficacité ?", s’interroge-t-elle lors de sa plaidoirie. Au total, ce sont 97 faux pass sanitaires qui ont été faits par le Docteur Lucas.
Le deuxième avocat, Maître Djalil Gangate, prend la parole et commence par la lecture du serment d’Hippocrate devant les juges. À la fin de sa lecture, il demande aux membres du tribunal de prendre en compte ce texte lors de leur délibération.
Il rebondit également sur la question, en insistant sur le fait que les vaccins ont été autorisés par l’Agence Nationale du Médicament alors qu’ils étaient encore en phase d’essais cliniques et que leur efficacité était encore inconnue.
À la fin de la première partie du procès, le procureur a prononcé ses réquisitions à l’encontre du docteur Lucas, des sanctions qu’il considère injustes selon l’avocate de la défense : "Je suis outrée par la décision du parquet pour deux raisons", déclare-t-elle. "On impose au Docteur Lucas une responsabilité qui n’est pas la sienne. Un médecin ophtalmologue qui a étranglé des patientes en pleine consultation n’avait eu comme réquisitions que cinq ans de non-exercice."
Le jugement sera rendu le 29 juin à 14 heures. Le Docteur Lucas a prononcé ses dernières paroles devant la Cour : "J’ai agi de manière très répréhensible, et je présente mes excuses les plus humbles à la cour. J’ai agi ainsi uniquement pour l’humanité."