Ce lundi 25 novembre est la journée mondiale de lutte contre les violences faites aux femmes. Pour l’occasion, nous avons rencontré Myriam Barreau, adjudante-cheffe au Tampon et cheffe du groupe VIF (violences intrafamiliales) de la ville.
“Une bonne prise en charge permet qu’on ne rajoute pas un trauma au trauma”, explique l’adjudante-cheffe Myriam Barreau dans la gendarmerie centrale du Tampon. Il y a trois ans, l’institution a mis en place des “groupes VIF” pour les violences intrafamiliales. Ces violences sont principalement des violences conjugales et touchent des femmes à 85,97% (en 2022,2023), les enfants également en sont victimes. Ces violences peuvent être d’ordre physique, verbale, psychologique, économique ou sexuelle. La Réunion est le quatrième département français le plus touché par les violences conjugales.
L’adjudante-cheffe chapeaute le groupe du Tampon qui compte une dizaine de militaires. Les membres de ce groupe se concentrent sur les violences familiales et sont déchargés d’autres missions comme les patrouilles ou les contrôles routiers. “La gendarmerie a mis le paquet pour former son personnel à détecter les signaux silencieux de danger”, appuie la cheffe de groupe dont chacun des membres est formé au traitement des délits intra-familiaux.
A l’écoute des victimes
La prise en charge de ces victimes bien particulières se fait dès leur arrivée en gendarmerie. “Même en plein milieu de la nuit, une victime sera reçue en gendarmerie. On va rapidement les détecter et les prendre à part pour ne pas qu’elle ait à s’expliquer devant tout le monde”, précise l’adjudante-cheffe Myriam Barreau. En effet, difficile de se confier à propos de sujets intimes dans la petite salle d’accueil de la gendarmerie, où d’autres personnes attendent pour déposer plainte.
Une fois isolées, les victimes répondent à un questionnaire. “On évalue le danger de la situation, on cherche à savoir si la personne est isolée, si elle a déjà été victime”, expose Myriam Barreau. Puis c’est parti pour au moins deux heures d’audition. En cas d’urgence, les victimes peuvent bénéficier de dispositif de rapprochement comme le bracelet anti-rapprochement ou le téléphone grave danger. Une intervenante sociale travaille également avec les gendarmes et a un bureau au sein de la brigade. Les enfants sont aussi pris en charge : “ce sont des victimes collatérales et ont besoin d’être protégés”, indique la cheffe de groupe.
Dans le sud de l’île, le “pack nouveau départ” est à l’essai. “Il est sur mesure pour les besoins de cette femme et piloté par la CAF. Certaines ont besoin d’un logement, d’autre d’un nouveau compte bancaire, par exemple”, fait savoir l’adjudante-cheffe.
Avec l’expérience, la militaire connaît bien les mécanismes d’emprise qui piègent les victimes de violences conjugales. “Souvent, la violence morale et psychologique introduisent l’emprise, qui profite de l’humiliation et du rabaissement. Elle entraîne une perte de confiance où les victimes pensent ne plus rien être sans l’homme. Il peut y avoir plusieurs aller-retours avant de définitivement s’en aller”, explique-t-elle, “elles ont tendance à banaliser les insultes, les menaces. Elles disent : “il a menacé de me tuer, mais il ne va jamais le faire””. Alors la gendarme fait aussi de la pédagogie et tente d’expliquer aux victimes que ces violences ne sont pas normales. “Ma priorité, c’est d’éviter qu’une situation s’aggrave”, confie-t-elle.
Philippine Kauffmann