Ce mercredi 28 septembre s’ouvre la troisième journée du procès de l’affaire de Benjamin L. à la cour d’Assise Saint-Denis. Le gramoune de 84 ans serait décédé des suites de ses blessures après une agression devant le casino de Saint-Pierre, dans la nuit du 26 septembre 2018. Deux hommes sont dans le box des accusés, deux autres comparaissent libres et un autre, sur les lieux au moment des faits, est présent en tant que témoin.
À 8h30, la cour d’Assise de Saint-Denis s’installe dans un brouhaha qui remplit une salle d’audience quasiment vide. La sonnerie retentit, une voix annonce alors “levez-vous la cour.” D’un coup, le silence s’installe.
Débute alors le moment clef du procès. Le visionnage de la vidéo enregistrée par la caméra de surveillance du casino de Saint-Pierre. À la vue des premières images, les filles de la victime, mouchoirs à la main, les yeux rivés sur les écrans, scrutent chaque image. Le temps semble s’être suspendu.
Elles sauront enfin le rôle tenu par chacun des cinq prévenus dans l’agression de leur père.
Les premières images plantent le décor. Un parking vide. Deux SDF couchés à proximité du casino. Deux individus apparaissent alors à l’image. Puis, arrive Benjamin L. sur le parking. Moins d’une minute après, trois personnes se lancent à sa poursuite. Deux d’entre elles vont physiquement s’en prendre à lui. Les autres protagonistes se tiennent à quelques pas, derrière eux.
Moins de cinq minutes après, on aperçoit alors l’octogénaire gisant sur le sol, “incapable de se relever”, précise alors le juge. Quant aux agresseurs, c’est d’un pas nonchalant qu’ils quittent les lieux, sans un regard pour leur victime. Dans leur main, la sacoche du gramoune.
Parmi les cinq accusés, un profil sort du lot. C’est en 2014 que celui que nous appellerons Pablo se fait négativement connaître des autorités judiciaires de Vichy, ville dans laquelle il a déménagé en quête “d’un avenir meilleur.” Après une brève inscription à la mission locale de la ville, il prend rapidement un abonnement au tribunal de la cité thermale. Suite à de nombreuses condamnations avec sursis, il est finalement condamné à de la prison ferme et incarcéré à plusieurs reprises.
Le jeune homme se plaint : “Mes conditions de détention ne correspondent pas à mes attentes. On se croirait en Colombie.” Il aggrave son cas. Son comportement lui vaut plusieurs procédures disciplinaires pour dégradations de biens publics ou encore trafic de stupéfiants à l’intérieur de la prison.
Interpellé sur le fait qu’il n’a jamais eu de travail, il rétorque tout naturellement : “je cherchais, mais je ne trouvais pas.” Ce à quoi l’avocat général répond : “C’est sûr, on ne peut pas tout faire entre chercher du travail et trafiquer."
Pendant la totalité de l’audience, il garde un visage dur, fermé et a une “attitude de petit caïd”, lance le juge. Le bâtonnier Hoarau, défenseur de l’un des co-accusés, demande même “si ce n’est pas lui le chef de la bande ?” S’appuyant sur le fait “ qu’il considère que la violence avec une arme, c’est une blague”, pour étayer son argument.
Face aux filles de la victime, Pablo ne manifeste aucune empathie. “Si vous n’aviez pas agi, leur père serait encore en vie. Il n’y a aucune humanité en vous”, lui scande alors le juge. “Je ne m’attache pas, c’est pour les faibles”, le magistrat cite alors l’accusé. “Cela porte un nom : sociopathe ou psychopathe.”
Cette dernière remarque ne provoque aucun émoi chez le jeune homme. Son comportement ne changera pas d’un iota jusqu’à la fin de l’audience. Sur ces faits, la cour suspend l’audience pour reprendre dans l’après-midi la suite de l’étude des personnalités des quatre co-accusés.