15 mois de prison avec sursis et 3 ans d’inéligibilité sont requis à l’encontre de Didier Robert. Le président de région sera fixé sur son sort le 21 mai, retour sur 9 heures d’audience. Le procès s’est terminé vers 22h00 ce jeudi soir. Les avocats de la défense et de la partie civile ont fait valoir leurs arguments.
Didier Robert face à la justice : retour ce vendredi sur l’un des procès les plus médiatisés de La Réunion. L’actuel président et candidat à sa succession de la Région Réunion, doit répondre de plusieurs chefs d’accusation dans l’affaire des Musées Régionaux : prise illégale d’intérêt, abus de biens sociaux et concussion. Son ex-collaboratrice Christine Clain, est soupçonnée de recel de prise d’illégale d’intérêt.
Les réquisitions sont tombées tard dans la soirée de ce jeudi 22 avril. Le délibéré est attendu le 21 mai prochain. Les deux parties font valoir leurs arguments, l’audience a duré hier près de 9 heures.
Dans un premier temps, la défense de Didier Robert, représentée par Maître Morel et Maître Gangate, tente d’obtenir un renvoi de l’affaire. Elle invoque une QPC (question prioritaire de constitutionnalité). Une proposition rejetée après délibération car "dénuée de caractère sérieux" selon le juge. Le procès s’est donc poursuivi.
Vient ensuite l’audition du président de Région sur sa gestion de la Société publique locale (SPL) des Musées régionaux.
À la barre, Didier Robert répond aux questions des magistrats. Le Président de Région parle de son parcours : ses études, ses formations, ses mandats politiques et même sa vie privée. Vient ensuite la question de ses rémunérations – question au cœur des débats. Le président détaille alors ses revenus et ses dépenses.
Les minutes s’écoulent et le Président de Région en vient à évoquer son mandat en tant que président de la SPL. Au début de ce mandat, Didier Robert refuse de toucher un salaire pour son poste au sein de la société, avant de changer de position.
Didier Robert vient de perdre son siège de sénateur et la rémunération associée de 9 000 euros. Didier Robert s’octroie alors un salaire de 6 800 euros bruts pour la période de 2016 à 2017 en tant que PDG de la SPL des Musées régionaux. "Une rémunération qui survient quand votre salaire de député touche à sa fin" souligne le président du tribunal. "Qui a signé ce papier, si ce n’est vous ?" demande alors le magistrat. Le président de la Pyramide inversée nie avoir signé mais indique n’avoir qu’appliqué un tampon sur la délibération de la commission permanente. "Moi de mes petites mains, je signe tous mes documents", déclare le président de séance.
Autre fait évoqué : lors d’une commission permanente à la Région, Didier Robert se fait représenter par Jean-Louis Lagourgue et son salaire est voté. Or, la décision de rémunérer le président (de la SPL) doit être votée par le conseil d’administration. Didier Robert se défend en assurant qu’il ne savait pas qu’il était obligatoire de réunir un conseil d’administration pour procéder au vote de son salaire.
Les juges évoquent également la différence de salaire entre Didier Robert et son prédécesseur à la tête de la SPL : près d’un tiers supérieur, et la situation de la SPL. À cette époque, les finances de la SPL sont dans le rouge, et 8 salariés font l’objet d’un plan de licenciement économique. "J’ai travaillé, j’ai effectué ma mission" retorque Didier Robert devant le tribunal.
Devant le tribunal, Didier Robert fait face et répond à toutes les questions du président de séance. La question des jetons de présence est abordée. Des jetons qui permettent, aux administrateurs de la SPL de toucher de l’argent.
Le prévenu se défend : "Un président est un administrateur". Les débats continuent.
À la barre Didier Robert et Christine Clain. Cette ancienne chargée de mission au sein de la SPL est suspectée de concussion.
En effet, son salaire aurait été doublé sans passer par les ressources humaines, quelques mois avant la rupture conventionnelle de son contrat de travail.
Une augmentation de salaire que Didier Robert dit conforme à la "convention collective".
Devant le tribunal, l’avocate d’Anticor souligne les liens de proximité entre Christine Clain et Didier Robert, ainsi que l’augmentation de salaire. "Si sa rémunération a été doublé, c’est pour lui permettre de toucher plus de chômage", indique Me Nathalie Potin. Christine Clain réfute ces accusations, et indique qu’elle n’était pas au courant de l’irrégularité de cette procédure.
Après ces échanges, Éric Tuffery, procureur de la République s’exprime. Il évoque en premier lieu le cas de Christine Clain. "La façon dont le départ de madame Clain a été préparé pose problème." Une hausse de salaire qui ne serait pas passée par la DRH et qui surtout aurait eu lieu alors que la SPL affichait des comptes dans le rouge.
S’agissant de Didier Robert, le procureur met en avant le manque de transparence et souligne le fait qu’un président ne peut s’attribuer lui-même un salaire. C’est au conseil d’administration de l’y autoriser.
Vers 19h30, les réquisitions tombent. Le procureur requiert trois ans d’inéligibilité et 15 mois de prison avec sursis à l’encontre de Didier Robert, ainsi que six mois de prison avec sursis pour Christine Clain.
Vient la parole à la défense. Me Alain Rapady, avocat de Christine Clain évoque le fait que sa cliente n’était pas consciente "de participer à quelque chose de frauduleux".
C’est au tour des avocats de Didier Robert de s’exprimer. Me Jean-Jacques Morel débute sa plaidoirie. Il met en avant le fait que le prévenu a redressé les comptes de la SPL, alors qu’elle se trouvait déjà dans une situation catastrophique.
Les avocats de la défense rejettent toutes les accusations formulées. Me Morel reconnait des erreurs administratives mais affirme que "tout n’est pas pénal dans la vie". La défense demande la relaxe des deux prévenus.
Le président de région sera fixé sur son sort le 21 mai.
- Lucas Candessoussens