Premier thonier mauricien de la Sapmer, le Belle Rive a effectué sa première mission dans l’Océan Indien. Plus de 700 tonnes de thon pêchées et une matière première valorisée principalement pour le marché asiatique.
C’est le premier d’une nouvelle série de bateaux. Contrairement aux cinq premiers navires acquis par la Sapmer et immatriculés à La Réunion, le Belle Rive bat pavillon mauricien.
A bord du bâtiment de quatre-vingt dix mètres de long, trente-cinq marins français, mauriciens, seychellois, malgaches et indonésiens auxquels il faut ajouter les membres de l’équipe de protection embarquée, un commando de militaires positionnés sur le navire pour parer aux éventuels actes de piraterie.
Le thonier senneur surgélateur, tout droit sorti de l’usine, a été mis en service cette année. Et la première "marée" comme on l’appelle dans le jargon a été fructueuse.
700 tonnes de thon ont en effet été pêchées. De bons résultats donc pour cette mission inaugurale de près de soixante-dix jours. Plus de 6000 tonnes de listao et d’albacore devraient être remontées dans les immenses filets chaque année. Construit au Viet-Nam pour un peu plus de vingt millions d’euros, le Belle-Rive se différencie des premiers navires de la Sapmer.
Plus petit, moins puissant, et surtout quatre fois moins gourmand en gasoil, il est doté d’outils à la pointe de la technologie. Radars pour repérer les oiseaux, courantomètre, sonars et autres systèmes 3D aident l’équipage du Belle Rive a localiser les bans de thon albacore et listao.
Particularité du Belle Rive : le poisson est congelé vivant. Remontée mécaniquement grâce à la senne ( outil dont le coût s’élève à 500 000 euros), la prise est ensuite plongée dans la saumure à moins 18°c. Cette procédure de pré-congélation effectuée, le poisson est ensuite congelé à mois 40°c et stocké dans les six cales situées à l’avant du bateau.
Denis Le Roland est le capitaine du Belle Rive. Il explique que "la pêche à vents libres est privilégiée", et ajoute : "l’activité de pêche se concentre essentiellement dans le canal du Mozambique. Aucun quota n’est imposé, mais nous nous limitons par nous-mêmes".
L’acquisition de ce bateau illustre le partenariat solide entre la Sapmer et Maurice. La société française créée en 1947 a de fait obtenu des licences lui permettant d’immatriculer cinq de ses nouveaux navires dans l’île soeur.
Avec le Belle-Rive, Sapmer donne un coup d’accélérateur à son activité de pêcherie de thon et espère dans les années à venir calquer ce schéma dans le Pacifique. Il s’agit également d’intensifier les activités de transformation du thon afin de pénétrer davantage le marché asiatique.
Plus de 4 000 tonnes de thon stockées à moins 40°c
C’est dans ce cadre qu’une seconde usine de transformation a vu le jour. Après Mer des Mascareignes (financée à parts égales par le groupe mauricien IBL et Sapmer), une nouvelle filiale de Sapmer a été baptisée à Port-Louis : Tuna Processing Services Indian Ocean.
C’est dans ces lieux que pourront être stockées et valorisées 60 000 tonnes de thon listao et albacore, chaque année. L’activité de l’usine Tuna Processing Services - Indian Ocean a été lancée au mois de juin dernier.
Directeur de l’usine TPS-OI, Christopher Talbot affiche clairement les objectifs : " cette usine, c’est la grosse cavalerie pour les longes. L’objectif à terme pour Mer des Mescareignes et TPS-OI est de traiter 30 000 tonnes de poisson afin d’obtenir au mois 12 000 tonnes de produit fini." L’unité de transformation TSP-Océan Indien qui compte présentement 90 salariés environ emploiera plus de 200 salariés à l’horizon 2015.
En attendant, chaque jour, ce ne sont pas moins de vingt tonnes de poisson qui sont traitées. Et cette productivité devrait s’accroître progressivement. Entre la première étape du processus de transformation et la palettisation, seulement huit minutes s’écoulent.
Un délai réduit au maximum afin de ne pas rompre la chaîne du froid. Si une infime partie de cette production est écoulée sur le marché réunionnais, c’est bien dans les assiettes japonaises que l’on retrouve plus de 80% du thon transformé dans l’usine TPS-OI.
L’activité de l’usine Tuna Processing Services se décline selon deux axes : d’une part la production de steaks destinés à être commercialisés aux Etats-Unis et au Canada. D’autre part, la transformation du thon pêché en longe, où le produit fini classé dans la catégorie des produits premium sera vendu sur le marché asiatique.
Sapmer à la conquête de l’Asie
La création de Sapmer Holding, l’acquisition de nouveaux thoniers, une nouvelle usine de transformation : ces étapes majeures symbolisent les ambitions de la Sapmer pour l’avenir.
Interrogé pour Antenne Réunion, le Directeur Général Yannick Lauri a détaillé les enjeux : " Notre prochaine série de navires « thonier senneur surgélateur » sera immatriculée à Maurice. Les débarques de tous nos thoniers se faisant à l’île Maurice, nous avons souhaité développer les infrastructures mauriciennes déjà en place afin de pouvoir accueillir les prises importantes de notre flotte grandissante. Maurice représentera, pour Sapmer, la base de ses activités thonières avec ses navires, ses capacités de stockage et ses capacités de transformation".
Sur le plan environnemental, la Sapmer, dont l’activité est critiquée par certaines organisations non gouvernementales, brandit les certifications obtenues depuis 2010, avec en premier lieu le label "Pêche responsable" du Bureau Veritas acquisil y a trois ans, les reconnaissances Dolphin Safe (depuis août 2011) et Friend of the Sea ( depuis septembre 2012).
Outre ses activités de pêche à la langouste et à la légine (pêche australe dans la zone des Terres Australes et Antarctiques Françaises), Sapmer - qui enregistrait en 2012 un chiffre d’affaires de 93,1 millions d’euros, dont plus de 85% à l’exportation hors Europe - entend aujourd’hui étendre son activité de pêche thonière, pour conquérir un marché de niche. C’est dans ce but que Sapmer prévoit d’ailleurs de s’introduire sur le marché financier asiatique.
La société française a le regard tourné vers le Pacifique, "où les ressources sont quatre fois plus importantes que dans l’Océan Indien, pour des conditions de navigation plus faciles de surcroit" souligne le Directeur Général de la société Yannick Lauri.
Le futur de Sapmer se dessinera notamment en Papouasie-Nouvelle-Guinée, où la société de pêche française a obtenu dix licences effectives jusqu’à l’horizon 2018.
Objectif : créer une base où seront amarrés dix bateaux et où sera érigée une usine de transformation. Mais cela prendra du temps car il faut construire des routes, réaliser des infrastructures pour permettre à l’activité de prendre son essor.