L’ex-gendarme Jean-Hugues Matelly radié pour manquement à son obligation de réserve, une mesure rarissime, a marqué un point avec la décision du Conseil d’Etat de suspendre en partie l’exécution du décret de radiation.
PARIS (AFP) - L’ex-gendarme Jean-Hugues Matelly radié pour manquement à son obligation de réserve, une mesure rarissime, a marqué un point avec la décision du Conseil d’Etat de suspendre en partie l’exécution du décret de radiation.
Le Conseil d’Etat avait examiné mardi un nouveau référé de l’ex-chef d’escadron (commandant) Matelly, 44 ans, qui contestait sa radiation des cadres pour avoir critiqué le rattachement de la gendarmerie au ministère de l’Intérieur.
Le juge des référés, Jacques Arrighi de Casanova, a rendu sa décision jeudi et "ordonné la suspension des effets les plus dommageables de la sanction infligée" à l’ex-gendarme, "à savoir la privation de rémunération et l’obligation de libérer (son) logement de fonction", a annoncé le Conseil d’Etat.
Dans une déclaration à l’AFP, M. Matelly s’est dit "particulièrement heureux" alors que l’un de ses avocats, Me William Bourdon, pénaliste reconnu, a fait part de sa "satisfaction" d’une décision "ouvrant la voie à toutes les portes de sortie possibles".
Le juge, selon l’avocat, l’"a fondée sur le fait que la sanction" visant Matelly "est disproportionnée par rapport aux faits".
La défense de l’ancien gendarme souligne un passage de l’ordonnance, qui met l’accent sur cette disproportion comme "de nature à créer, en l’état de l’instruction, un doute sérieux quant à la légalité du décret" de radiation.
Le général Jacques Mignaux, directeur général de la gendarmerie nationale (DGGN), a déclaré pour sa part, dans un communiqué à l’AFP, "prendre acte de l’ordonnance" du juge "qui n’a pas suspendu la mesure de radiation" de Matelly.
"Ce dernier demeure donc radié des cadres de la gendarmerie nationale, même s’il a été, à titre provisoire, maintenu dans son logement et sa rémunération", fait valoir le DGGN.
Le général ajoute "que le Conseil d’État, à ce stade, ne s’est pas prononcé au fond et "que les manquements répétés de M. Matelly aux devoirs de sa charge ont déjà été sanctionnés".
Il évoque à cet égard une sanction de blâme, moins lourde que la radiation, précédemment infligée au chef d’escadron en 2007, - déjà pour manquement à l’obligation de réserve à laquelle sont expressément soumis les gendarmes de par leur statut militaire -, "confirmée le 9 avril dernier par le Conseil d’État".
Le 30 mars, cette même instance, estimant qu’il n’y avait pas urgence, avait rejeté un premier référé dit (de) liberté de M. Matelly contestant sa radiation. Il avait de nouveau saisi mardi la haute juridiction.
M. Matelly a été radié par "mesure disciplinaire", par un décret du président de la République du 12 mars, pour "manquement grave" à son obligation de réserve.
Il lui est reproché de s’être exprimé en tant que chercheur du Centre national de la Recherche scientifique (CNRS), fin 2008, en critiquant, dans des médias, le rapprochement police-gendarmerie au sein du ministère de l’Intérieur, effectif depuis le 1er janvier 2009.
Cette mesure rarissime de radiation, la plus lourde en la matière, lui a été signifiée le 25 mars.
Il y a trois groupes de sanctions dans la gendarmerie, du blâme (1er groupe) à la radiation (3ème groupe), en passant par l’exclusion temporaire (2ème groupe).
La bataille n’est pas close. Le juge du Conseil d’Etat a précisé qu’il "reste saisi de l’affaire au fond" et qu’il doit maintenant "se prononcer définitivement sur la légalité du décret contesté".