La Commission indépendante sur l’inceste et les violences sexuelles faites aux enfants (Ciivise) propose 82 recommandations dans son rapport final, publié ce vendredi 17 novembre.
La Ciivise a été lancée en mars 2021 dans le cadre de la lutte contre l’inceste et les violences sexuelles faites aux enfants, rappelle France Info.
La Commission a rendu son rapport final de 750 pages vendredi 17 novembre en proposant 82 recommandations de politiques publiques pour mieux lutter contre le phénomène. Ce document a souligné que les violences sexuelles contre les mineurs sont fréquentes, car quelque 160 000 enfants en sont victimes chaque année. Elles concernent surtout les filles, puisque 83% des personnes qui se sont confiées à la Ciivise sont des femmes.
Face à ces données inquiétantes, la Commission préconise la formation des professionnels pour instaurer le questionnement systématique sur les violences sexuelles. Elle demande également l’organisation d’une grande campagne nationale de sensibilisation annuelle.
Dans son rapport, la Ciivise a souligné que dans la grande majorité des cas (97%), les incestes sont commis par un homme souvent majeur (81%). Elle a détaillé qu’il s’agit surtout des pères (27%), des frères (19%), des oncles (13%), des amis des parents (8%) ou des voisins de la famille (5%). Comme proposition, la Commission souhaite notamment renforcer le contrôle des antécédents via le FIJAISV (Fichier judiciaire automatisé des auteurs d’infractions sexuelles ou violentes) pour prévenir ces violences. Entre autres, elle a mentionné l’allongement de la durée de conservation des données tout en permettant aux agents de la police judiciaire de le consulter ou en facilitant sa consultation en cas de recrutement pour une activité en contact avec les enfants.
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Plusieurs conséquences des violences sont citées dans ce rapport final. Au total, 89% des victimes ont développé des troubles associés au psychotraumatisme ou trouble de stress post-traumatique (TSPT). Selon le document, 47% ont connu un trouble alimentaire et 51% des problèmes physiques. Une victime sur trois, soit 31%, fait face à une addiction à l’alcool, à la drogue ou aux médicaments si 24% ont eu recours à l’automutilation (surtout des femmes). Ces violences ont également impacté énormément la vie affective et sexuelle des victimes, leur relation sociale ainsi que leur vie professionnelle.
La Commission a ainsi proposé un parcours de soins pris en charge à 100% par la Sécurité sociale et a aussi demandé une meilleure réparation indemnitaire des victimes.
La Ciivise a dévoilé que seuls 13% des victimes ont révélé les violences au moment des faits et 70% des enfants sont crus. Pourtant, 45% d’entre eux ne sont pas protégés après avoir parlé. Pire, 27% des personnes qui ont eu connaissance des révélations demandent à l’enfant de ne pas en parler, voire même, elles le rendent responsable de l’agression.
En raison de cette situation, la Commission souhaite instaurer une obligation de signalement par les médecins des enfants victimes de violences sexuelles. Pour sécuriser les enfants, elle demande la création d’une OSE (ordonnance de sûreté de l’enfant) ainsi que la suspension des visites médiatisées dans le cas de violences sexuelles.
Selon la Ciivise, 19% des cas font l’objet d’un dépôt de plainte et pire encore, seule une plainte sur six pour viol ou agression sexuelle sur mineur aboutit à la condamnation de l’agresseur, une sur dix en cas d’inceste. Les agresseurs sont par ailleurs condamnés à des "peines dérisoires", puisqu’en moyenne ils écopent d’une peine de quatre ans d’emprisonnement ferme ou avec sursis.
Pour améliorer le traitement judiciaire des violences, la Ciivise préconise de déclarer imprescriptibles les viols et agressions sexuelles commis contre les enfants. Elle propose aussi de prioriser les enquêtes pour violences sexuelles sur mineur et que les enquêtes pénales et les expertises judiciaires soient conduites par des policiers et des praticiens spécialisés sur les violences sexuelles.
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