Illustration/SIPA
Lors des premières mobilisations des "Gilets Jaunes", la forte présence des pères et mères vivants seuls avec leurs enfants a été remarquée. Ces familles monoparentales sont visiblement les plus concernées par la crise.
Une enquête récente de l’Observatoire des inégalités relève que les familles monoparentales représentent près "d’un quart de la population pauvre" dont 19% vivent sous le seuil de pauvreté. Selon l’Insee, en 2016, 34,8% des personnes vivant dans une famille monoparentale étaient pauvres. "Leur présence sur les barrages n’est pas étonnante car les familles monoparentales sont de plus en plus nombreuses et qu’elles ont subi une forme de paupérisation ces dernières années, liées à une augmentation de plusieurs de leurs postes de dépenses", observe Maryse Bresson, professeure de sociologie à l’Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines, citée par 20 Minutes.
Dans un appel à témoins réalisé par le site d’actualités, plusieurs parents seuls témoignent de leur désarroi pour faire face à leur vie quotidienne. "Je gagne 1 500 euros nets par mois et je paye 500 euros de loyer pour un T2 en bordure de Toulouse", raconte Ibahia, mécanicien ouvrier qui vit seul avec sa fille de 12 ans. "Si j’obtenais un crédit immobilier, je ne pourrais acheter qu’un T1, donc nous restons là où nous sommes. Mes vacances à la montagne ne sont pas possibles et je ne peux pas m’acheter une voiture écolo trop chère. Alors ce n’est pas 100 euros de plus par mois qui suffiront", précise-t-il. Il a ainsi fait allusion à la hausse de 100 euros par mois de la prime d’activité annoncée pour répondre à la mobilisation des "Gilets Jaunes". Ces faibles revenus sont aussi liés aux difficultés rencontrées par les parents isolés sur le marché de l’emploi. "Ils occupent très souvent des emplois à temps partiel, car il est difficile de faire garder leurs enfants", observe Maryse Bresson.
Les mères célibataires sont les plus touchées par les difficultés financières, relève également 20 Minutes. Elles représentent 85% des parents à la tête d’une famille monoparentale. "A la suite d’une séparation une chute de 20% du niveau de vie chez les femmes est constatée contre 3% pour les hommes", rapporte l’Insee. Cette situation s’explique par le fait que très souvent le conjoint touchait un salaire plus élevé que la femme. Du côté de l’emploi, en 2017, les femmes occupaient en effet 70% des CDD et des emplois intérimaires et 78% des emplois à temps partiel. Par ailleurs, les femmes seules sont souvent recrutées aux secteurs d’activité les moins rémunérateurs : nettoyage, services à la personne, santé, hôtellerie-restauration...
Pauline Leclère, responsable de campagne justice fiscale et inégalités chez Oxfam France relate de son côté que la "crise des "Gilets Jaunes" a rendu visible ces invisibles". "Alors que les familles monoparentales vivent généralement repliées sur elles-mêmes, depuis un mois elles ont renoué avec une forme de socialisation et commencent à s’organiser", constate-t-elle. 20 Minutes a également mis en exergue que malgré leur situation, les parents isolés ne touchent pas tous d’aides sociales. "Les allocations familiales ne sont pas versées si on a un seul enfant, hors dans 57% des familles monoparentales, il n’y a qu’un enfant", cite en exemple la professeure Maryse Bresson.
Le 10 décembre 2018, Emmanuel Macron a répondu aux cris d’alerte de ces parents. Une "colère sincère … des parents qui n’ont pas les moyens de faire garder les enfants et d’améliorer ses fins de mois", avait-il reconnu. Outre la hausse de la prime d’activité, la défiscalisation de la prime de fin d’année et l’annulation de la taxe carbone sur l’essence, le plan pauvreté annoncé en septembre devrait répondre aux difficultés. Le gouvernement a entre autres annoncé la création de 30 000 places en crèche ainsi que le développement de la tarification sociale de la restauration scolaire qui bénéficieront entre autres aux familles monoparentales.