Dans une interview exclusive accordée à La Provence , Emmanuel Macron a annoncé que les consommateurs de cannabis pourront payer immédiatement en liquide ou par carte bancaire leur amende.
La récente déclaration d’Emmanuel Macron dans La Provence, le 25 juin, concernant l’encaissement immédiat des amendes forfaitaires pour possession et consommation de drogue, suscite des réticences parmi les forces de l’ordre, qui s’inquiètent de devoir se transformer en agents du Trésor public. Le principal enjeu réside dans le taux de recouvrement des amendes forfaitaires délictuelles, qui stagne à un maigre 35%, un chiffre peu dissuasif.
En 2016, lorsque ces amendes ont été instaurées, l’objectif était d’améliorer l’efficacité du système. Auparavant, les policiers devaient appréhender et placer en garde à vue le contrevenant, qui était ensuite présenté au parquet pour détermination de la sanction. Au cœur de Marseille, une ville rongée par le trafic de drogues, Emmanuel Macron souhaite accélérer le processus en autorisant un paiement "immédiat". Le chef de l’État a demandé la publication d’un décret d’ici la fin de l’été.
Ainsi, un policier ou un gendarme pourra encaisser une amende de 150 euros (montant réduit en cas de paiement dans les 15 jours, mais qui s’élève à 200 euros au-delà et même à 450 euros en cas de majoration) par carte bancaire ou en liquide. L’article 529-8 du Code de procédure pénale prévoit déjà cette possibilité de règlement direct par un agent de police au moment de la constatation. Cependant, dans la pratique, les syndicats de police reconnaissent que cette option théorique n’est pas mise en œuvre sur le terrain. Denis Jacob, secrétaire général d’Alternative Police CFDT, affirme que cela est "irréalisable". Ses propos sont soutenus par les représentants interrogés par Le Figaro.
"Il est de notre devoir de faire respecter la loi et d’interpeller ceux qui ne la respectent pas. Nous ne sommes pas des agents du Trésor public", s’insurge-t-il. François Bersani, porte-parole d’Unité SGP Police d’Île-de-France, déclare : "Les policiers portent déjà entre 5 et 10 kilos de matériel sur eux. Ils ne vont pas en plus devenir des vendeurs ambulants avec un terminal de paiement électronique et un carnet de reçus". Les syndicats se posent également des questions concernant la gestion de l’argent liquide : les policiers devront-ils rendre la monnaie ? Marc Hocquard, secrétaire national du syndicat UNSA Police, tonne : "Les agents devraient avoir une enveloppe pour stocker l’argent, ce qui est techniquement impossible".
Denis Jacob ajoute : "Nous devrons leur fournir une preuve de paiement, ce qui implique de tenir un carnet de reçus répertoriant toutes les transactions". Il déplore cette annonce qui "alourdit leur travail". Selon le secrétaire général d’Alternative Police, cette mesure va à l’encontre de l’objectif de "déployer un maximum de policiers sur le terrain". De plus, la sécurité des forces de l’ordre est également une préoccupation majeure. "La population visée par les amendes forfaitaires délictuelles entretient déjà une relation conflictuelle avec la police. Si un agent doit rester plus longtemps dans un quartier, cela pourrait dégénérer", explique Denis Jacob.