L’ancien ministre des Affaires étrangères Bernard Kouchner a avoué à "La Croix" que les décisionnaires de son époque avaient été proches des "génocidaires".
À l’époque, les décideurs français n’ont pas voulu voir qu’ils étaient les amis des bourreaux au Rwanda. Bernard Kouchner, ex-humanitaire et ancien ministre des Affaires étrangères (2007-2010), a indiqué dimanche que la France a sa part de responsabilité dans le massacre de 1994, au Rwanda.
"La France avait commis une très lourde faute politique au Rwanda en 1994", a-t-il estimé.
Il a d’ailleurs indiqué au quotidien La Croix qu’il s’était rendue trois fois au Rwanda durant ce génocide. Depuis Kigali, il avait appelé le président français François Mitterrand pour lui expliquer la situation
"Ne croyez pas tout ce qu’on vous raconte. Le FPR (Front patriotique rwandais) n’est pas à la solde des Américains. Ils sont entrés au Rwanda au nom de leurs familles tuées par les Hutus depuis l’indépendance. Ici, nous sommes les amis des bourreaux. Il faut absolument arrêter tout ça", a-t-il fait savoir à François Mitterrand.
Quelques jours avant la fin du génocide, le président rwandais Paul Kagame a accusé la France d’avoir soutenu les génocidaires, pouvoir hutu. Le rôle que la France a joué entre avril et juillet 1994 reste encore un sujet délicat.
Pour rappel, environ 800 000 personnes ont été tuées au Rwanda entre avril et juillet 1994, d’après l’ONU.
>> A lire aussi : Rwanda : Paul Kagame réélu à près de 100% des voix
Selon le président français, Bernard Kouchner avait exagéré dans ses propos. Et pourtant, la France a commis une faute lourde au Rwanda selon l’ancien ministre des Affaires étrangères.
"Les décideurs n’ont pas voulu voir (...) qu’ils étaient amis des génocidaires. C’est l’énorme ambiguïté de la France au Rwanda", ajoute-t-il.
Bernard Kouchner avait aussi affirmé qu’il est intervenu auprès d’Alain Juppé, ministre des Affaires étrangères de l’époque. Il lui avait demandé d’arrêter les massacres.
"Je sais cela. Je suis pour que l’on intervienne et pour arrêter le massacre. Mais certains, au gouvernement, s’y opposent", aurait répondu Alain Juppé à Bernard Kouchner.
Malgré la démentie de Paris sur son implication dans les massacres, le quotidien français La Croix a publié les propos d’un ex-aviateur français ayant participé à l’opération française "Turquoise" au Rwanda. Il a indiqué que les militaires français étaient déjà préparés à "frapper les troupes du FPR".
"Bien sûr qu’il y a des militaires qui, sur ordre, se sont préparés à frapper le FPR. Mais quand Turquoise a commencé, le FPR avait gagné la partie. La ligne humanitaire a alors pris le dessus sur la ligne offensive à l’Élysée", a commenté Bernard Kouchner.
>> À lire aussi : Rwanda : BNP Paribas visée par une plainte pour complicité de génocide
(Source : Europe 1)