Le torchon brûle entre le procureur général près la Cour de cassation, Jean-Louis Nadal, et le procureur de Nanterre, Philippe Courroye. Le premier a recommandé hier la saisine d’un juge d’instruction pour mener de nouvelles investigations dans le cadre de l’affaire Woerth-Bettencourt. Une initiative que son confrère de Nanterre voit d’un très mauvais œil. Celui-ci revendique le contrôle du dossier, avec la poursuite de son enquête préliminaire.
Hier lundi 27 septembre, le procureur général près la Cour de cassation, Jean-Louis Nadal, " a recommandé au procureur général de Versailles que les investigations se poursuivent dans le cadre de l’information judiciaire, seul cadre procédural de droit commun existant qui permette le strict respect des droits de la défense par l’accès à la procédure et l’assistance d’un avocat ". M. Nadal avait estimé qu’il était encore trop tôt pour saisir la Cour de justice de la République (CJR). Le magistrat avait affirmé qu’il ne disposait pas suffisamment d’éléments pour déterminer si le ministre Eric Woerth s’est-il rendu coupable ou non des faits de conflits d’intérêt qui lui sont reprochés dans le volet de l’affaire Bettencourt. Des faits délictuels qui remontent en mai 2007, lors de son passage au ministère du Budget.
Le procureur Jean-Louis Nadal a pris ce dossier en main suite à la demande cet été de l’eurodéputée Corinne Lepage qui proposait de saisir la CJR afin d’éclaircir les soupçons de conflits d’intérêt pesant sur Éric Woerth. Cette juridiction étant la seule habilitée à juger les délits commis par un ministre dans l’exercice de ses fonctions.
Mais hier dans la soirée, le procureur de Nanterre, Philippe Courroye, est monté au créneau pour réclamer le contrôle de cette affaire Woerth-Bettencourt. Il revendique en premier lieu la poursuite de son enquête préliminaire, selon une source proche du dossier.
La balle est désormais dans le camp du parquet général de Versailles. Cette instance juridique peut décider de laisser Me Courroye, qui est placé sous son autorité, continuer ses enquêtes, comme elle peut répondre favorablement à la recommandation de Me Nadal, en désignant un juge d’instruction, ouvrant ainsi la voie au lancement d’une nouvelle information judiciaire.
A noter que le procureur général près la Cour de cassation Jean-Louis Nadal n’est pas le supérieur hiérarchique du procureur général de Versailles.
" C’est à la justice de s’organiser comme elle souhaite ", estime le ministre Eric Woerth, tandis que son avocat s’est dit satisfait de la non-saisine de la CJR.
" Mon souci est qu’on aille vite. Une enquête préliminaire très dense est en cours depuis trois mois, je n’ai pas envie que l’on reparte à zéro avec un nouvel interlocuteur. " a déclaré Me Jean-Yves Leborgne.