Trois rescapés de l’attentat de Saint-Étienne-du-Rouvray se confient pour la première fois sur le terrible drame dont ils ont été témoins. Deux mois après, la blessure est difficile à panser.
Dans son nouveau numéro, l’hebdomadaire Famille Chrétienne s’est consacrée aux témoignages des rescapés de l’attaque de Saint-Étienne-du-Rouvray. Sœur Danielle et Guy et Janine Coponet ont accepté de raconter l’enfer qu’ils ont vécu.
Le 26 juillet dernier, Guy Coponet, un paroissien de 87 ans, son épouse Janine et sœur Danielle étaient aux côtés du père Hamel lorsque deux hommes se revendiquant de Daesh ont fait irruption dans l’église. Confrontés pendant plus d’une heure aux terroristes, Guy Coponet raconte l’horreur des faits. "Ils m’ont frappé de trois coups de couteau, au bras, au dos et à la gorge. L’urgentiste qui m’a soigné m’a dit : ’Il y avait une main divine sur vous car aucun des coups n’a touché un organe vital’. C’est comme un miracle !", a-t-il relaté. Mais le plus dur pour ce paroissien est d’avoir été obligé de filmer l’assassinat du père Hamel. "Les deux jeunes tueurs m’ont attrapé par le ’colbac’, m’ont mis une caméra dans les mains et m’ont dit : ’Papy, tu filmes’. Ils venaient même vérifier la qualité des images et constater que je ne tremblais pas trop. J’ai dû filmer l’assassinat de mon ami le Père Jacques ! Je ne m’en remets pas", a-t-il confié encore sous le choc. Selon lui, les deux hommes avaient l’intention de "faire une vidéo destinée à faire le tour du monde sur les réseaux sociaux, ce qui leur permettrait de mériter leur titre de gloire de ’martyr’ d’Allah".
Sœurs Danielle, qui assistait avec deux de ses sœurs religieuses à la messe ce mardi-là, a donné l’alerte aux forces de l’ordre. Elle se souvient d’une conversation surréaliste entre Kermiche et sœur Hélène. "Avez-vous peur de mourir, lance Kermiche à Hélène. - Non, répond-elle. Il s’étonne : - Pourquoi pas peur ? - Parce que je crois en Dieu et je sais que je serai heureuse", raconte sœur Danielle. "Il murmure : ’Moi aussi je crois en Dieu et je n’ai pas peur de la mort’. Puis il clame : ’Jésus est un homme, pas Dieu !’", poursuit sœur Danielle. Aujourd’hui, elle interprète l’action des deux terroristes comme un "suicide". "Ils voulaient mourir. J’ai hâte de pouvoir leur demander au Ciel : ’Pourquoi, tout cela ?’". Interrogée sur les raisons qui ont pu conduire Adel Kermiche, dont elle connaissait la famille, à recourir à une telle violence, elle apporte une réponse troublante : "nous sommes là dans des cas complexes où se mêlent fragilité psychologique, vide existentiel, ignorance religieuse et culturelle… C’est un cocktail Molotov prêt à exploser".
Malgré cette expérience douloureuse Guy Coponet ne tient pas rigueur aux deux jeunes terroristes. "Il me semble, tel que je les ai vus, tel que cela s’est terminé, je ne les crois pas responsables. C’est un peu comme une secte. Ils sont tellement travaillés. Ils sont tellement, dans leur esprit, fanatisés". Dimanche 2 octobre, l’église compte rouvrir ses portes pour accueillir les fidèles.