Prise de parole du maire sortant, Gilbert Annette, lors de la première séance du Conseil municipal du 4 juillet.
Dans son discours, Gilbert Annette a déclaré avoir souvent dit être un maire heureux. Il a précisé être heureux de s’être engagé auprès des habitants de Saint-Denis et plus largement de la population réunionnaise. Il a dit être heureux pour participer à la transformation de notre société qui est profondément marquée par les stigmates de notre passé colonial. Heureux d’avoir partagé avec des hommes et des femmes les mêmes valeurs de progrès et de les avoir rassemblés sous une vision progressiste de notre avenir au-delà des positions partisanes qui parfois minent des appareils politiques. Heureux surtout de s’être engagé pendant tant d’années pour un combat central, celui de l’égalité, de toutes les égalités. De la lutte contre les discriminations, de la volonté que le fait d’être né dans une famille défavorisée ne soit pas une fatalité. Que l’on pouvait être ambitieux, surtout si cette ambition se mette au service des autres.
Gilbert Annette : Permettez-moi donc un peu d’histoire, En 1989, nous remportions une victoire historique en libérant Saint-Denis des archaïstes installés depuis des décennies par un pouvoir conservateur. J’étais heureux d’être le premier maire socialiste de Saint-Denis et grand symbole aux yeux de beaucoup, donc de devenir le premier maire cafre. En m’élisant tout en m’accordant leur confiance, la majorité des électeurs rendaient aussi hommage à nos ancêtres esclaves. Ceux, sans qui la terre ne serait pas la terre, disait Aimé Césaire. Notre équipe de l’époque a ouvert la voie à de chantiers majeurs, matériels comme immatériels qui ont changé le visage de Saint-Denis aux bénéfices de l’épanouissement et du mieux-vivre ensemble de ses habitants. Déjà après l’élection du premier président de gauche de la 5e République, François Mitterrand en 1981, qui avait suscité tant d’espoir dans toute la nation. Il nous a fallu ici nous battre pour le principe d’égalité sociale, pour tous les Réunionnais. De cette égalité dépendait notre dignité de citoyens français à part entière. Pour nous Dionysiens, nous subissons le diktat de ceux qui pensaient encore que l’égalité du Smig avec la Métropole était la perte assurée de l’économie réunionnaise. Que l’égalité sociale allait causer la perte morale de notre société réunionnaise. Que le Créole ne pourrait être considéré comme une véritable langue. Ou que le 20 décembre, pourtant déjà férié, ne valait pas une bonne fête des letchis et des mirabelles. Notre victoire de 1989 et je reconnais dans la salle des visages qui m’avaient accompagné à cette époque, il y a 30 ans, avait marqué un tournant dans l’histoire de notre ville. Et même s’il y eut un temps d’arrêt en 1994, pour des raisons qu’"on connaît et pour lesquelles ma responsabilité avait été engagée". Et même s’il y a eu la défaite de 2001 au profit des héritiers de nos adversaires conservateurs. Je suis heureux d’avoir été capable en 2008 de renouer le lien de confiance, qui n’avait jamais réellement disparu avec les Dionysiens.
Gilbert Annette : Pendant ces douze dernières années, j’ai été le maire de tous les Dionysiens, quel que soit leur lieu de naissance, Saint-Denis bien sûr, mais il y a aussi Saint-Benoit, le Port ou Saint-Pierre, Dunkerque, Marseille ou La Rochelle, Moroni, Dzaoudzi, Tananarive… Du moment qu’ils aient choisi Saint-Denis comme lieu de vie et de communauté de destin. Quelque soit leur religion, quelque soit leur choix de vie, leur philosophie ou leur spiritualité, leur orientation sexuelle ou leur engagement citoyen. Qu’il soit sportif ou artiste, débutant ou émérite, adepte de loisirs populaires ou des nouvelles pratiques ludique. Quelque soit leur choix partisan, quelque soit leur milieu social. Qu’il soit issu de famille défavorisée ou aisée, chômeur, employé, chef d’entreprise, habitant de belle villa ou de logements sociaux. J’étais le maire de toutes les dionysiennes et de tous les dionysiens. J’ai nourri toute mon action politique, mes décisions, mes combats personnels et collectifs de chaque discussion de chaque débat. Nous avons toujours avancé ensemble en ayant à l’esprit l’intérêt général. Et je suis fier aujourd’hui de me présenter devant vous avec le sentiment du devoir accompli même si le combat continue. Fier de l’éradication de ces grands bidonvilles des années 80 dans des nombreux quartiers qui emprisonnaient de nombreuses familles dans des habitats indignes, facteurs aggravant de l’échec scolaire, des violences intra familiales, d’addiction à l’alcool, de la délinquance. Nous avons construit tant de logements sociaux pour redonner de la dignité aux familles et le combat continue.
Gilbert Annette : Fier de la haute qualité éducative que nous offrons aux enfants dionysiens, notamment avec l’Anglais dès la maternelle, pour lutter contre l’ignorance en s’appuyant sur les valeurs véhiculées par l’école, le sport et la culture. Nous avons construit des médiathèques dans l’emblématique médiathèque François Mitterrand nouvellement renouvelée. Et nous avons offert tant et tant d’activités enrichissantes à nos jeunes telles que le yoga, les échecs et le théâtre, etc. Nous devons être ambitieux pour notre jeunesse et le combat continue. Je suis fier de ces belles réalisations culturelles, de la Cité des arts et du nouveau château Morange. Nous avons fait le choix de lieu où la culture ne se consomme pas, mais où elle s’imprègne et surtout se fabrique. Nous avons posé les bases de créativité dionysienne et surtout réunionnaise. Des nouvelles ambitions pour nos artistes, pour tous les talents dionysiens. C’est par l’expression de tous talents que nous trouverons des nouvelles pépites qui représenteront la culture réunionnaise au plus haut niveau, ce combat continue. Fier de la réussite de la Technor car il nous a fallu près de 30 ans entre la volonté affichée de faire de ces champs de canne la première technopole de l’outre-mer. De la maîtrise publique foncière des terres qui ont été arrachées à des sociétés, à ces bâtiments modernes érigés aujourd’hui, entre les quelques emplois agricoles de l’époque et la création de près de 2 000 emplois hautement qualifiés. Espace de recherches et d’innovation, je suis fier de voir aujourd’hui qu’il ne reste plus que quelques dents creuses pour parfaire ce projet. Il nous faut encore favoriser la création de plus d’emplois attractifs et épanouissants pour notre jeunesse, le combat continue.
Gilbert Annette : Enfin, je suis fier d’avoir redoré le blason de notre identité réunionnaise, d’avoir hissé le drapeau de l’unité réunionnaise sur nos bâtiments municipaux, d’avoir permis la dénomination de rues, d’avoir donné une place à notre langue dans notre communication, d’avoir écrit notre langue dans l’espace public et enfin d’avoir réservé une place à notre histoire, à toute notre histoire dans l’espace public par des nouvelles statues et autres représentations que nous avons installé. Certains en sont restés aux discours incantatoires, nous, nous l’avons fait simplement, là aussi, rien n’est acquis, ce combat continue. Je veux remercier les Dionysiennes et les Dionysiens, qui, par leur vote de dimanche dernier, ont exprimé une satisfaction du travail que nous avons accompli. Je veux aussi remercier du fond du cœur chacune des personnes, élu, militant, employé communal, représentant d’Etat, les institutions partenaires, bénévoles associatifs, entrepreneurs, artisans, acteurs du monde économique. Toutes celles et ceux, par leur qualité, furent des partenaires exigeants tels que nous l’avons entamé depuis plusieurs mandats.
Selon le maire sortant, quand on s’engage en politique, quand on entre en campagne, quand on cherche à convaincre nos concitoyens, c’est toujours sur la base de convictions, d’idéaux, d’idées et de projets pour changer l’avenir. Mais voir les réalisations des projets, les villes se changer, c’est autant de gratification autant de récompenses dont on ne peut évaluer la véritable valeur.
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