Alors que son avenir politique demeure encore incertain, Madagascar devait aussi cette année faire face à une insécurité grandissante, notamment dans le sud où les vols de bétails ont été particulièrement meurtriers.
Depuis juin dernier, trois régions du sud de Madagascar ont été marquées par des affrontements d’une extrême violence entre forces de l’ordre et voleurs de bétails (dahalo). Le bilan est lourd et l’armée malgache parle de sa plus grosse perte depuis son instauration en 1960. De juin en septembre, 20 militaires ont péri sous les feux des dahalo. Ces derniers ont aussi essuyé de nombreuses pertes dans leurs rangs et les villages qui sont sensés être parmi leurs repaires ont été incendiés. L’essentiel à retenir de ce malheureux évènement.
Tout a commencé en juin dernier lorsque des éléments regroupés au sein de la Compagnie de Sécurité intérieure (CSI), une cinquantaine, ont été pris dans un guet-apens tendu par quelques 150 bandits, armés de lance-roquette et de fusils à gros calibre alors qu’ils devaient suivre la trace des voleurs de bétails. 12 émissaires de la CSI avaient été tués dans cette attaque dont le commanditaire se prénomme Remenabila, un bandit notoire du sud-est malgache.
Depuis cet incident, le district de Befotaka et ses environs étaient devenus une véritable zone de combat. Des renforts ont été dépêchés sur les lieux pour récupérer les corps des militaires et gendarmes, retenus par les bandits et pour traquer le fameux Remenabila dont la tête a été même mise à prix pour 100 millions d’ariary (environ 35 700 euros).
Une opération a été lancée le 13 septembre dernier. Baptisée Tandroka ou « cornes », celle-ci s’est fixée comme mission principale de rétablir l’ordre dans les régions classées zones rouges et surtout, mettre fin à la vindicte populaire, devenue une pratique très courante dans plusieurs villages.
Ayant
pris fin ce mois-ci, cette opération a reçu de nombreux critiques, notamment de la part des politiciens locaux et de l’Amnesty international parlant d’«
exécutions sommaires », d’
« actes de violence aveugle » ou encore de «
véritables massacres » pour qualifier les moyens dont les forces armées ont usé pour traquer Remenabila et ses pairs.
Plusieurs instances étrangères ont également interpellé les dirigeants malgaches par rapport à ce qui se trame dans le sud du pays. A l’instar de la Communauté de développement de l’Afrique australe (Sadc), les diplomates étrangers en poste à Madagascar, ainsi que l’Union européenne. Une rencontre entre ces derniers et le premier ministre malgache fin novembre a même évoqué la possible ouverture d’une enquête indépendante dirigée par les Nations Unies pour élucider l’affaire. L’Exécutif malgache n’a émis aucune objection par rapport à cette proposition.
Les hauts responsables de l’armée avaient présenté un rapport concernant le déroulement de l’opération durant cette rencontre. Ils ont fait état de 224 morts et 25 blessés avant, pendant et après l’opération.
Dans ce lourd bilan, on compte 23 décès et 7 blessés dans les rangs des forces de l’ordre, 180 morts et 2 blessés du côté des voleurs de zébus (dahalo) et 21 habitants abattus.
Selon toujours le document, 81 dahalo (voleurs de zébus) ont été déjà arrêtés. Pour ce qui est des vols de zébus, 7 965 bovidés ont été enlevés à leurs propriétaires avant l’opération Tandroka. 1 393 d’entre eux ont pu être restitués. Avec l’intervention d’une force mixte dans le sud, sur les 1 902 vols, 50,21% ont été récupérés. Quant au fameux Remenabila, les militaires n’ont pas encore réussi à mettre la main sur lui jusqu’à présent.
Autre fait ayant marqué l’année 2012 dans la Grande île : la crise politique. Déclenchées en 2009 avec le départ forcé de Marc Ravalomanana, les tensions politiques peinent à se dénouer dans le pays. Des médiations ont été encore entreprises cette année avec en perspective, des têtes-à-têtes qui devaient ramener cet ancien président et celui qui l’a renversé à l’époque, Andry Rajoelina, sur la table des négociations mais la deuxième, organisée en Tanzanie dernièrement, a été mort-né. L’actuel n°1 de la transition locale ayant refusé de rencontrer son rival.
Le retour au pays de Marc Ravalomanana ainsi que la question du processus électoral de mai 2013 restent les principales pierres d’achoppement entres les deux hommes et leur mouvance respective. Raison pour laquelle la Sadc a préconisé le fameux NI…Ni…concernant la participation des deux protagonistes à la prochaine élection présidentielle organisée au pays en mai 2013.
Si Marc Ravalomanana s’est laissé facilement convaincre par le président tanzanien, Kikwete, actuellement à la tête de la Troika de la Sadc, en optant pour cette voie afin d’assurer un climat d’apaisement à Madagascar, Andry Rajoelina, lui,
continue d’entretenir le suspens concernant sa candidature.
En visite à Paris ce mois-ci pour rencontrer le ministre des Affaires étrangères, Lurent Fabius, ce dernier a encore affirmé à la presse française que les Malgaches seront les premiers à être informés de sa décision le temps venu. Il se prononcerait sur la question d’ici le 8 mars 2013, date à laquelle les noms de tous les prétendants à la course présidentielle malgache devraient être connus.
En attendant, toutes les tractations continuent de part et d’autres des deux camps rivaux. Les principaux meneurs au sein de la mouvance Ravalomanana ont déjà fait savoir que si Andry Rajoelina persiste à se porter candidat, cela obligera leur leader à revenir sur sa décision de renoncer à son ambition politique.