La ministre des Outre-Mer, Éricka Bareigts s’est exprimée sur la question du logement : l’éradication des habitations insalubres et la construction des logements sociaux.
La ministre des Outre-mer, Éricka Bareigts, s’est exprimée sur le sujet du logement. La représentante du gouvernement a rappelé la volonté du gouvernement de "dynamiser" le secteur du bâtiment et notamment les logements sociaux.
De son côté, la Fédération réunionnaise du BTP (FRBTP) estime que ces annonces ne suffisent pas. Les chantiers démarrés en 2016 seraient moins nombreux que prévu. La situation devrait empirer l’année prochaine selon Bernard Siriex, le président de la FRBTP : "C’est une profession dans laquelle nous pourrions avoir des licenciements, rapidement, en fin de cette année ou en début de l’année prochaine qui pourraient s’élever à plus d’un millier de personnes."
Bernard Siriex ajoute : "Aujourd’hui, on a un gros problème. C’est l’aménagement du foncier. On a rien, il y a rien dessus, c’est quelque chose qui dépend de la Région."
Les bailleurs sociaux sont eux satisfaits des annonces : "Aujourd’hui, la ministre a fait un certain nombre d’annonces qui vont dans le sens des bailleurs sociaux à la fois sur le financement et les capacités à faciliter les démarches administratives pour mener à bien les projets sur des problématiques comme l’amiante qui touche particulièrement La Réunion", explique Olivier Bajard, directeur général de la SHLMR.
Voici en partie le script du discours d’Éricka Bareigts :
"Le logement, constitue un des priorités majeures du Ministère des Outre-mer. C’est une priorité parce que l’accès à un logement décent est une condition de dignité humaine, d’épanouissement, d’émancipation des individus.
- D’abord, nous dynamisons la construction de logements compte-tenu des déficits constatés : nous sommes passés, grâce à un effort renforcé de l’Etat au travers de la LBU et des aides fiscales, de 57 à 77 logements sociaux pour 1 000 habitants en 15 années à la Réunion. Cette augmentation a été particulièrement sensible entre 2010 et 2015 avec un accroissement de près de 11 logements par 1000 habitants en l’espace de 5 ans.
- Ensuite, nous luttons contre l’habitat insalubre et les quartiers informels. 10 millions d’euros sont engagés chaque année à la Réunion dans le cadre de l’assainissement et la restructuration des quartiers d’habitat, la régularisation foncière des occupants et l’accompagnement social des familles.
- Enfin, nous rénovons et réhabilitons les logements existants. Je pense à l’action de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine qui intervient à Saint-Benoit, Saint-Pierre, au Port, à Saint-André et Saint-Denis. L’ANRU prévoit de financer 76 millions d’euros sur un montant global de travaux de 285 millions d’euros.
- Je pense en premier lieu à la prorogation du crédit d’impôt pour le logement social jusqu’en 2020 dans les DOM et de la défiscalisation jusqu’en 2025 dans les COM qui a été sécurisée dans le PLF2016. Il s’agit là d’une avancée majeure pour donner de la visibilité aux investisseurs et permettre l’élaboration d’une véritable programmation.
- Je pense aussi à la suppression de l’agrément fiscal pour le crédit d’impôt logement social qui est désormais acquise. Cette annonce du Premier Ministre, le 31 mai, était particulièrement attendue au regard de la situation du secteur du BTP. Elle a redonné, je crois, un peu d’oxygène aux opérateurs et a permis une relance de l’activité.
- Je pense également à l’extension du crédit d’impôt aux travaux de réhabilitation des logements sociaux et la prolongation de 3 à 5 ans du délai pour bénéficier des subventions permettant de mener les travaux de réhabilitation. La production de logements neufs doit nécessairement s’accompagner d’un effort en faveur de la rénovation de logements dégradés.
- Je pense enfin à la suppression de la contre-partie LBU pour la construction de logements sociaux en prêt locatif social. C’était une demande des socio-professionnels, elle est désormais satisfaite. En parallèle de cette action proactive sur la composante logement du secteur du BTP, l’Etat a également souhaité intervenir de manière proactive sur la commande publique. Il l’a fait au travers de :
- l’attribution d’une enveloppe complémentaire de soutien à l’investissement public local en 2016 - sur les 10,14 M€ mis à ma disposition pour La Réunion, déjà 9,93M€ ont déjà été répartis sur 20 projets des collectivités (communes et communautés de communes), pour un montant total d’investissements de plus de 20 M€ qui seront engagés dès cette année ;
- la mobilisation du fonds exceptionnel d’investissement pour 4 projets à la Réunion, soit 7,73 M€ de subvention pour 19 M€ d’investissement, en parallèle de la prolongation du plan local de redynamisation de la Base aérienne 181, soit 1,7M€ de subventions pour plus de 15 M€ d’investissement ;
- l’accroissement de l’ordre de 5% en 2016 de la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR),
- un engagement financier réaffirmé de l’Etat dans le cadre du contrat de plan Etat-Région,
- le chantier de la Nouvelle Route du Littoral avec la signature il y a quelques jours de l’avenant à la convention AFTIT.
Voilà des avancées concrètes. Elles ont permis de redonner confiance aux acteurs et de relancer le secteur du BTP : j’en veux pour preuve l’augmentation rapide du nombre de salariés du BTP qui a dépassé les 17 000 travailleurs en août 2016 contre 16 000 travailleurs un an plus tôt !
D’ores-et-déjà, 2016 est la deuxième année la plus importante, sur les six dernières années, en matière de livraison de logements neufs avec presque 3 300 logements sociaux neufs livrés. Du côté de la commande publique, les marchés de travaux ont atteint plus de 1,1 milliard d’euros à la Réunion, montant figurant parmi les plus importants de ces 15 dernières années, plus de deux fois supérieur à celui du début des années 2000.
Si une embellie de la situation est perceptible, il convient de consolider cette reprise. Dès ma nomination, j’ai souhaité mettre toute mon énergie aux nombreux combats qu’il nous reste à mener, notamment sur le logement, pour aller plus loin.
J’ai ainsi fixé deux priorités : d’une part, la production, l’amélioration et l’adaptation des logements ; d’autre part, la fluidification des parcours résidentiels qui passe, ici encore plus qu’ailleurs, par le développement de l’offre en logements intermédiaires et la promotion des dispositifs d’accession sociale.
- Plusieurs dispositions de la loi « Egalité réelle Outre-mer » vont permettre d’amplifier la dynamique engagée ces derniers mois dans ces domaines.
Il s’agit en premier lieu du renforcement de l’attractivité du crédit d’impôt pour la rénovation et la réhabilitation dans les Outre-mer. Nous prévoyons en effet d’accroître le plafond des dépenses éligibles de 20 000 à 50 000 euros et le taux de 20 % à 40 %. Résultat : il finançait hier au maximum 4000 euros sur des travaux d’un montant moyen de 55 000 euros ; désormais l’avantage fiscal perçu par les opérateurs s’élèvera à 20 000 euros. De quoi, j’en suis convaincu, inciter fortement à la rénovation des logements dégradés et vieillissants. De quoi, également, relancer l’activité pour des artisans du bâtiment à la Réunion.
Je m’assurerai que cette mesure puisse prendre effet dans le périmètre ciblé dès 2017, en amont de la signature des conventions NPNRU s’il le faut. Je crois que le maintien du zonage est nécessaire pour concentrer l’effort dans les quartiers les plus en difficulté. Sans restriction géographique, la logique d’optimisation pourrait aboutir à favoriser les logements les moins dégradés et pour lesquels le loyer justifierait le plus de procéder aux travaux compte-tenu du plafonnement des dépenses éligibles. A la Réunion, près de 3500 logements sont concernés.
Autre mesure qui favorisera la production de logements tout en améliorant les parcours résidentiels de nos compatriotes : la suppression de l’agrément fiscal pour les programmes de logement en PSLA. C’était une demande des organismes de logement sociaux, la voilà désormais satisfaite. Il nous reste toutefois à en définir les modalités techniques de mise en oeuvre. Pour cela, j’ai annoncé lors du Congrès de l’USH, la mise en place d’un groupe de travail sur la thématique de l’accession social, vous y serez associés au travers des délégations de l’USH.
- Mais au-delà de ces dispositions qui figurent dans le projet de loi « égalité réelle Outre-mer », je souhaite engager plusieurs chantiers :
- le premier chantier, c’est celui de la diminution des coûts de construction.
Selon l’ARMOS Réunion, le coût moyen des logements aurait connu une hausse de 66,4% de 2011 à 2015 et selon la DEAL, ce coût pour les logements sociaux aurait augmenté de 41,2% sur la période 2008-2015.
Cette hausse très importante et une proportion croissante de LLTS financés conduisent à une augmentation de la consommation de LBU par logement et, à enveloppe constante de LBU, à une baisse du nombre de logements programmés.
Dans le rapport que j’ai rendu sur l’application de la loi de régulation économique Outre-mer, je formule un certain nombre de préconisations, notamment en ce qui concerne la régulation des marchés de gros pour les matériaux de construction.
J’ai sollicité il y a quelques jours le Ministre des Finances afin qu’il saisisse l’Autorité de la concurrence sur cette question et que nous puissions, par la suite et si le besoin s’en fait sentir, prendre les mesures de réglementation nécessaires.
J’ai également demandé à la DGCCRF de réaliser, dans le cadre du programme national d’enquête 2017, une étude portant sur le coût des matériaux de construction, avec un focus spécifique sur le coût du ciment et des granulats.
Ces deux démarches viendront compléter celle du Haut conseil pour la Commande publique qui va réaliser prochainement une étude approfondie sur la décomposition des prix des logements.
Une étude va être lancée sur les conditions d’émergence d’une filière de traitement de l’amiante localement. Nous avons besoin de connaissance pour construire les bases d’une industrie durable et d’identifier les freins. Elle sera lancée en novembre, pour 4 mois.
Je souhaite aussi qu’une enveloppe du Programme Recherche et Développement Amiante soit fléchée pour les Outre-mer : le contexte y est particulièrement et justifie cette sanctuarisation.
Beaucoup de problèmes me sont remontés sur les problématiques de débouclage des opérations et de fin de défiscalisation, notamment en ce qui concerne la présentation de justificatifs demandés par le BAGR qu’il est impossible de produire en raison de la faillite de certaines entreprises, mais aussi en ce qui concerne des enjeux de TVA et de droits de mutation pour les reventes à l’issue de la période de défiscalisation. Mon cabinet a mobilisé Bercy a plusieurs reprises sur cet enjeu ; si des réponses ne vous sont pas apportées dans les prochains jours, je compte moi-même saisir le Ministre des Finances pour vous donner une plus grande visibilité.
Outre ces problématiques de débouclage, l’ingénierie du financement du logement social concerne aussi les questions de garantie qui sont apportées pour les opérations. Je crois que nous devons limiter le nombre de garants par opération, pour raccourcir les délais et simplifier le processus. Je me réjouis donc du projet de protocole prévoyant qu’un seul garant interviendra par opération ; cette évolution, je le crois, permettra de gagner jusqu’à 6 mois dans les procédures.
De mon côté, j’ai récemment sollicité la Caisse des dépôts et consignation pour qu’elle adapte à la situation des opérateurs ultramarins les critères d’éligibilité à l’offre de prêts de haut de bilan qu’elle vient de lancer. A ce titre, je souhaite que la SIDR puisse bénéficier d’une nouvelle tranche de prêt sur l’enveloppe complémentaire de 1 Milliard d’euros au titre du Prêt de haut de bilan bonifié annoncée par le Premier Ministre au congrès de l’USH auquel je me suis rendue.
Je compte aussi poursuivre le travail engagé avec la BPI sur la problématique des délais de paiement pour développer une offre qui réponde aux contraintes qui pèsent sur les attributaires de marchés publics.
L’offre connaît un déclin important : en 2008, 5 000 logements intermédiaires étaient produits contre 750 en 2013 et 2014, et 450 l’année dernière. Les projections font état de 400 logements pour 2016, production bien en-deçà des besoins comme je l’indiquais. Sans retrouver les niveaux de 2008, qui ont pu contribuer à la formation d’une bulle immobilière comme le disent les spécialistes, je crois qu’il convient de relancer ce segment, je compte en faire une priorité.
À ce titre, le Gouvernement a souhaité favoriser la production de logement intermédiaire en augmentant le plafond pour le dispositif de Pinel DOM de 10 000 euros à 18 000 euros à la demande des socioprofessionnels.
Il est envisagé d’élargir champ d’application du crédit d’impôt pour les investissements dans les logements intermédiaires dans le cadre du projet de loi « Egalité réelle Outre-mer ». Je souhaite que les acteurs concernés s’approprient pleinement cette disposition pour que nous ne revivions pas l’épisode du Pinel DOM, qui devait relancer le secteur mais dont j’ai cru comprendre qu’il n’était finalement pas assez attractif.
Le dernier chantier, c’est celui de la cession du foncier de l’Etat pour accélérer la production de logements sociaux. J’ai demandé au Préfet que les terrains que nous avons identifiés soient cédés avant la fin de l’année et dédiés à la construction de logements sociaux.
De mon côté, je vais me rapprocher de ma collègue Emmanuelle Cosse pour lui suggérer d’étendre la possibilité de recourir à la décôte Duflot pour la construction de logements évolutifs sociaux.
Enfin, lors de ma rencontre avec Thierry Repentin la semaine dernière, j’ai insisté pour que la future foncière solidaire, dotée de 750 millions d’euros, apporte une attention particulière aux Outre-mer."
"Le logement est un vecteur de dignité pour les citoyens ; je souhaite que notre mobilisation permette d’améliorer leur quotidien. Dans ce combat, je sais pouvoir compter sur le travail des acteurs locaux, engagés ensemble dans la dynamisation du secteur du logement au service de tous les Réunionnais et de l’économie locale."