Ces trois derniers jours s’est déroulé le tout premier congrès sur la conservation des peuples autochtones et des communautés locales d’Afrique, à Windhoek, en Namibie. Parmi les invités, des tribus africaines telles que les Bushmen, les plus anciens habitants de l’Afrique australe, les Pygmées ou encore les Mikéas, tribu non reconnue par Madagascar. Deux d’entre eux se sont déplacés en dehors de leur territoire pour la première fois de leur existence.
C’est le premier déplacement à l’étranger dans l’histoire des Mikéas, peuple autochtone de Madagascar non reconnu parmi les 18 tribus locales (Betsileo, Merina, Vezo, etc.). L’association Mikéa Forest présidée par le malgache d’origine réunionnaise, Jean-Claude Vinson a été invitée par la coalition mondiale américaine Right and Resources qui se consacre à la promotion des droits aux forêts et aux ressources des peuples autochtones. Cette dernière a réuni des tribus d’Afrique pour évoquer les problématiques environnementales et politiques auxquelles elles font face.
Les Mikéas, peuple autochtone de Madagascar
C’est un combat de longue haleine. Chassés et mal perçus par l’Etat et la société depuis des siècles, les Mikéas se sont réfugiés dans une forêt de résineux, sèche, dans des conditions extrêmes, sans eau. Les Mikéas sont en perte de leur habitat naturel depuis des décennies à cause des activités humaines de tourisme et d’agriculture parfois clandestines (incendies à répétitions) au coeur de la forêt Mikéa située au sud-ouest de Madagascar. Ils ne sont plus que cinq chasseurs-cueilleurs vivant dans la forêt contre un millier d’individus en lisière de forêt, pratiquant aujourd’hui le troc avec la civilisation.
Depuis plus de trente ans, Jean-Claude Vinson, auteur malgache aux origines réunionnaises et ancien bras droit du ministre de l’environnement en 2019 à Madagascar, se bat pour la reconnaissance de ce peuple : « Cette invitation est la preuve d’une reconnaissance à l’internationale du peuple Mikéa, qui n’ont aucun statut car ils ne sont pas reconnus par les gouvernements successifs de Madagascar comme peuple autochtone. Ce genre de déplacement est très important », ponctue-t-il.
(Tsivahora, porte-parole de l’association Mikea Forest parmi les Himbas, tribu de Namibie)
Des origines lointaines, de 10 000 ans
En 2018, des recherches archéologiques révèlent la présence d’activités humaines à Madagascar de plus de 10 000 ans, des traces de chasseurs-cueilleurs nomades dont les Mikéas seraient les descendants.
Selon Jean-Claude Vinson, les enfants Mikéas représentent l’avenir de Madagascar car ils savent lire et écrire : « J’ai crée l’école Anaïs Vinson qui délivre un enseignement classique sans oublier leurs traditions. Du lundi au vendredi, ils ont français, mathématiques, Histoire…et le vendredi, ils partent en forêt avec un instituteur Mikéa pour apprendre leur milieu comme les traces des animaux par exemple. »
Tsivahora, porte-parole de l’association Mikea Forest et sa femme Emmanuelle, institutrice, espèrent tous deux que leur déplacement en Namibie permettra une plus grande visibilité à l’égard de l’Etat malgache.
- Ecrit par Rébecca-Alexie LANGARD, journaliste reporter d’images à Antenne Réunion.