Afin de dénoncer "l’affaiblissement de l’Etat", Marine Le Pen a écrit à tous les Préfets de France la semaine dernière. Cette opération de séduction exceptionnelle de la part d’un chef de parti n’a pas porté ses fruits sur le département : par erreur, le courrier a été adressé à Madame le Préfet de la Réunion et a donc fait l’objet d’un "classement vertical" ! De plus, le préfet Michel Lalande considère qu’il s’agit "d’une initiative inédite qui consacre une méconnaissance assez grave de la déontologie des hauts fonctionnaires en général et des préfets en particulier".
Les préfets ne veulent pas être pris « en otages » par Marine Le Pen. Leur réponse ne s’est pas fait attendre. Les préfets qui ont reçu ce courrier ont répondu par la voix du président de l’association du Corps préfectoral français qui s’est exprimé sur Europe 1. Daniel Canépa a rétorqué en insistant sur le fait que les préfets sont « désireux de rester en-dehors de ce type de débat ». "Nous n’avons pas à être pris en otages (...) dans ce que je considère comme une campagne électorale" souligne ce dernier.
Dans toute l’histoire de la Vème République, la démarche de Marine Le Pen est inédite. Jusqu’à maintenant, aucun chef de parti ne s’était directement adressé aux préfets. Le président de l’association du Corps préfectoral français et des hauts fonctionnaires du ministère de l’Intérieur rappelle « que les préfets exercent, conformément à la déontologie républicaine, de manière apolitique et dans un souci de respect scrupuleux de leurs obligations de neutralité et de réserve, leurs fonctions ». Selon Le Point, Daniel Canepa a répondu à la présidente du Front national, sous forme d’un "rappel" républicain : "les préfets en poste territorial n’ont nullement vocation à prendre parti pour tel ou tel projet politique".
A travers ce courrier adressé à tous les Préfets de France, Marine Le Pen souhaite "dénoncer l’affaiblissement de l’Etat" mais également "dédiaboliser le Front National". Dans cette lettre, la présidente du FN lance : « les grands serviteurs de l’Etat réellement soucieux de l’intérêt général n’ont aucune raison de redouter notre arrivée au pouvoir (...) Au contraire ! La perspective de redressement que je leur offre m’apparaît correspondre à ces moments de notre histoire où l’intelligence collective a su rencontrer un projet national et un espoir populaire ».
A la fin de sa lettre, Marine Le Pen précise que certains préfets l’ont contactée mais ce n’est pas le cas du Préfet de la Réunion Michel Lalande. Contacté à ce sujet, la Préfecture de la Réunion précise que cette lettre était adressée à Madame le préfet et qu’elle a donc fait l’objet d’un "classement vertical". Après avoir finalement pris connaissance de courrier, Michel Lalande considère qu’il s’agit "d’une initiative inédite et qui consacre une méconnaissance assez grave de la déontologie des hauts fonctionnaires en général et des préfets en particulier, déontologie qui leur impose une stricte obligation de neutralité et de réserve dans l’exercice de leurs fonctions".