Pour la première fois sur les Champs Elysée, les armées de 13 pays africains ont pris part au traditionnel défilé du 14 juillet. C’est sous un ciel capricieux que les soldats des anciennes colonies subsahariennes françaises ont ouvert successivement et en invité d’honneur, la parade sur les Champs Elysée hier.
Pour certains intellectuels africains, cette "faveur accordée à l’Afrique" est frustrante voire humiliante. Ils se disent ainsi choqué que Paris célèbre ainsi l’indépendance de ses ex-colonies. "C’est très difficile de faire passer dans l’opinion qu’il est pertinent pour l’ancienne puissance coloniale de célébrer elle-même, dans sa capitale, les 50 ans d’indépendance de ses anciennes colonies. Le président Nicolas Sarkozy ne s’est pas déplacé en Afrique pour les célébrations des indépendances, ni au Sénégal ni ailleurs. Et on voit 13 chefs d’Etat africains accourir autour de lui pour le 14 juillet, jour de la fête nationale française... Cela illustre peut-être ce complexe du colonisé que certains gardent encore vis-à-vis de Paris", fait remarquer Mamoudou Ibra Kane, un directeur de radio privée au Sénégal.
Par ailleurs, le passé houleux de la plupart des présidents et des armées invités à Paris a aussi soulevé l’indignation. Francis Kpatindé, ancien rédacteur en chef de l’hebdomadaire Jeune Afrique, n’a pas apprécié de voir des chefs d’Etat africains au pouvoir depuis 23 ou 28 ans aux côtés de Nicolas Sarkozy. "La plupart des dirigeants africains convoqués à Paris n’incarnent pas l’Afrique de l’espoir, l’Afrique des Lumières, l’Afrique de la Démocratie. Plusieurs d’entre eux sont d’anciens officiers ayant troqué l’uniforme militaire contre un costume de chef d’Etat. Où sont les intellectuels, les chercheurs, les artistes africains ?", s’interroge-t-il. Des ONG françaises et africaines ont également fait campagne contre ce défilé. Elles déplorent notamment la présence de criminels de guerre lors de la parade. Ainsi, pour Patrick Farbiaz, membre du réseau "Sortir du colonialisme", c’est le "défilé de la honte".
Par contre, du côté des autorités françaises, cette initiative est avant tout destinée à célébrer le cinquantenaire des indépendances octroyées sous le général de Gaulle. Nicolas Sarkozy se défend de toute "nostalgie coloniale" en soulignant au contraire "l’injustice et les erreurs" commises durant cette époque. "C’est le lien du sang que nous célébrons", a indiqué le Président français.