Le pilier de la musique réunionnaise s’est éteint hier à la Mapad. Selon ses proches, Jules Arlanda s’est laissé tout doucement mourir. La maladie, les disparitions successives de ses amis musiciens, mais surtout la menace d’expulsion pour cause de tram train lui ont tour à tour enlevé le goût de vivre.
Personne ne sait réellement combien de temps à vécu jules Arlanda dans cette petite maison en béton située rue Lucien Gasparin. La façade percée de quatre portes d’entrée aux volets de couleur rouge se trouve à moins de 50 centimètres des roues des voitures qui empruntent la deux voies à tombeau ouvert.
Autant dire qu’à l’heure de pointe, le bruit dans la maison pleine d’objets en tout genre, de Jules Arlanda était assourdissant. C’est pourtant ce bric à brac que Jules Arlanda ne voulait quitter pour rien au monde.
L’homme y vivait presque enfermé depuis plusieurs années. Entouré d’instruments de musique, de vieilles coupures de presse, d’une multitude de postes de radio en panne (…) Jules Arlanda passait tranquillement sa retraite. Tranquillement mais fortement préoccupé : il était menacé d’expulsion. Sa vieille maison située devant le parking du Grand marché, se trouve en effet sur le tracé du feu tram train.
Selon sa nièce, il vivait très mal le fait qu’on puisse lui ordonner de quitter sa maison un jour ou l’autre. Pourtant pas question pour le vieil homme d’user de sa notoriété en rejoignant le collectif contre le tram train…
Véritable chantre de l’histoire musicale créole, ce professeur de musique à la retraite avait également vu ces dernières années disparaître plusieurs grands noms de la musique locale qui avaient joué avec lui pendant presque de 50 ans : Benoîte Boulard, Maxime Laope, et « l’année dernière un des frères Lacaille… Ce dernier décès l’avait vraiment anéanti », confie Marie Hélène Maillot, sa nièce. Cette dernière a également perdu récemment sa mère, la sœur de Jules Arlanda.
Après un parcours musical rempli d’au moins 300 compositions, plusieurs distinctions honorifiques, une fin de vie tristement discrète, le musicien semblait avoir lui-même décidé qu’il était grand temps d’achever sa partition : il avait décidé de ne plus s’alimenter depuis lundi…