Téhéran et Paris ont démenti dimanche tout lien entre la libération de la Française Clotilde Reiss et le sort d’Iraniens, libérés ou libérables en France, malgré une frappante concomitance de dates et le fait que l’Iran ait plusieurs fois relié ces différentes affaires.
PARIS (AFP) - Téhéran et Paris ont démenti dimanche tout lien entre la libération de la Française Clotilde Reiss et le sort d’Iraniens, libérés ou libérables en France, malgré une frappante concomitance de dates et le fait que l’Iran ait plusieurs fois relié ces différentes affaires.
Le dénouement de l’affaire Reiss, après dix mois de blocage, intervient entre deux décisions de la justice française concernant deux Iraniens retenus en France, Majid Kakavand et Ali Vakili Rad, dont l’un a déjà rejoint l’Iran et l’autre devrait être autorisé à le faire prochainement.
Le chef de la diplomatie française Bernard Kouchner a assuré ne voir "aucun rapport entre ces deux affaires iraniennes traitées par la justice française et la libération de notre otage", dont Paris a toujours clamé la totale innocence face aux accusations iraniennes d’espionnage.
Téhéran a aussi affirmé que la libération de Clotilde Reiss n’avait "rien à voir" avec celle, le 5 mai, de l’ingénieur Majid Kakavand, retenu depuis mars 2009.
La justice française avait alors refusé d’extrader cet ingénieur aux Etats-Unis qui l’accusaient d’avoir fourni à son pays des composants électroniques pouvant avoir des applications militaires. Le retour en Iran de M. Kakavand a été applaudi à Téhéran comme un élément "positif" pour les relations bilatérales.
Par ailleurs, Ali Vakili Rad, l’assassin de l’ex-Premier ministre iranien Chapour Bakhtiar, qui a purgé la part incompressible de la peine de prison à perpétuité en France, devrait bénéficier prochainement d’une libération et être expulsé.
Le président Mahmoud Ahmadinejad lui-même avait comparé le sort de Clotilde Reiss et celui d’Iraniens retenus en France.
"Il y a quelques Iraniens en prison depuis des années. Ce sont des prisonniers qui, eux aussi, ont une famille", avait lancé en septembre M. Ahmadinejad. Interrogé sur une éventuelle grâce pour la Française, il avait observé : "Malheureusement nous n’avons vu aucune action du gouvernement français en faveur de ces prisonniers".
Le président Nicolas Sarkozy lui avait répondu de manière cinglante : "suis-je homme à aller échanger l’assassin de Chapour Bakhtiar contre une jeune étudiante dont le seul crime est de parler la langue de l’Iran et d’aimer la civilisation perse ?"
Pour François Nicoullaud, ancien ambassadeur de France à Téhéran (2001/05), les Iraniens voulaient effectivement "imposer ce lien et les Français ont refusé".
Selon M. Nicoullaud, l’interférence des dirigeants iraniens a plutôt "retardé les choses".
"Vakili Rad serait sorti plus tôt de prison si les Iraniens n’avaient pas créé ce lien. La justice française ne voulait pas donner l’impression qu’elle était à la botte" de Téhéran.
Par ailleurs, observe-t-on de source proche du dossier, l’amende à laquelle la Française a été condamnée correspond à la caution déjà versée par la France pour garantir sa libération provisoire en août dernier.
Sur le terrain diplomatique, Paris n’a durant cette période en rien atténué sa condamnation des violations des droits de l’homme et sa position intransigeante sur le programme nucléaire controversé.
Alors que le président Sarkozy a remercié ses homologues brésilien, syrien et sénégalais pour leur "rôle actif" pour débloquer le sort de Clotilde Reiss, certains estiment que les Iraniens pourraient l’avoir libérée à l’occasion de la visite du brésilien Luis Inacio Lula da Silva, qui aurait demandé sa libération.
"Pour l’Iran, c’était le moment de faire des gestes et de lâcher sur des dossiers nuisant à son image", selon des sources diplomatiques françaises, alors que Téhéran cherche des alliés pour éviter les sanctions.